Togo : Ahoomey-Zunu, Premier ministre en toute discrétion

Difficile d’organiser des législatives dans un climat politique tendu. C’est pourtant la tâche qui incombe au Premier ministre du Togo, Arthème Kwesi Ahoomey-Zunu, nommé en juillet 2012. Portrait d’un homme qui a la parole rare mais la langue acérée.

Ahoomey-Zunu a été nommé Premier ministre en juillet 2012. © Jc Abalo/Ahounou

Ahoomey-Zunu a été nommé Premier ministre en juillet 2012. © Jc Abalo/Ahounou

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Publié le 2 avril 2013 Lecture : 3 minutes.

Quand il a succédé à Gilbert Fossoun Houngbo, en juillet 2012, Arthème Kwesi Ahoomey-Zunu espérait sûrement travailler dans un contexte moins mouvementé. C’était avant que des incendies ravagent les marchés de Lomé et de Kara en janvier. Avant que plusieurs personnalités de l’opposition, suspectées d’être derrière ces actes criminels, soient inculpées. Depuis, le climat politique s’est considérablement tendu. « C’est une période délicate », confie un diplomate en poste à Lomé.

Ces événements, le Premier ministre a fait le choix de les commenter le moins possible. « Je dois être au-dessus de la mêlée », expliquait-il en janvier lors de son passage à Paris. Il concède cependant qu’ils « sont arrivés au plus mauvais moment ». Car pour celui qui s’est vu confier pour principale mission d’apaiser le climat politique afin d’organiser les élections législatives (la date du scrutin n’a pas encore été fixée, mais pourrait avoir lieu d’ici au mois de mai), les prochaines semaines seront cruciales. Et sans doute les positions radicales de certains membres de l’entourage présidentiel plongent-elles les modérés comme lui dans l’embarras.

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Atypique

Juriste de formation, Ahoomey-Zunu a, « sur le papier, les compétences pour réussir », estime le même diplomate. D’abord secrétaire administratif de la Commission nationale des droits de l’homme (CNDH) de 1988 à 1994, puis membre de la Commission des droits de l’homme de l’Assemblée nationale (1994-1999), il a également fait partie de la Commission électorale nationale indépendante (Ceni) de 1993 à 2005. Et en sera même le président entre 2000 et 2002. L’année 2005 marque le retour de la violence politique au Togo. Après la crise postélectorale, l’accord signé en 2006 prévoit la mise en place d’un gouvernement d’union. Ahoomey-Zunu l’intègre, et sera, en sa qualité de ministre de l’Administration territoriale, chargé de l’organisation des législatives de 2007 – leur bonne tenue a entraîné la reprise de la coopération internationale. Déjà pressenti au poste de Premier ministre, il est finalement nommé secrétaire général de la présidence, fonction qu’il occupera pendant quatre ans (2008-2012) et qu’il cumulera avec celle de ministre du Commerce et de la Promotion du secteur privé.

« Objet politique non identifiable », selon ses propres mots, « transhumant » pour ses détracteurs, aux qualités d’élocution et au franc-parler reconnus, voire redoutés, Ahoomey-Zunu, 54 ans, a un parcours atypique. Après avoir milité dès les années 1990 au sein de l’opposition modérée aux côtés d‘Edem Kodjo, d’abord à l’Union togolaise pour la démocratie (UTD) puis à la Convergence patriotique panafricaine (CPP), cet Éwé originaire de la préfecture de Kloto (Ouest) s’est peu à peu rapproché du président. Il n’a pourtant jamais été membre du Rassemblement du peuple togolais (RPT) et n’est pas encarté à l’Unir, la formation qui lui a succédé en avril 2012. « Nous travaillons bien comme cela », justifie l’intéressé. Sa nomination a eu l’avantage de contenter les historiques du RPT, ébranlés par la mort de leur parti. « Personne ne peut le soupçonner d’avantager les nouveaux de l’Unir », juge un ministre. Son rapprochement avec le pouvoir n’a toutefois pas été du goût de ses anciens amis, et notamment d’Edem Kodjo.

Ahoomey-Zunu sait qu’il sera en grande partie jugé sur sa capacité à conduire les élections. Dépeint comme « réfractaire au dialogue » par le collectif Sauvons le Togo, il a tenté à plusieurs reprises de réunir l’ensemble des partis politiques, sans grand succès. « Il faut être deux pour dialoguer », répond-il – oubliant un peu vite que la plupart des leaders de l’opposition sont dans le collimateur de la justice à la suite de l’affaire des incendies. L’opposition d’ailleurs a appelé ses partisans à participer au recensement qui a débuté le 15 mars, mais n’a pas, pour le moment, assuré qu’elle participera au scrutin.

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