Katanga : à petite vitesse

En attendant que les chemins de fer soient remis à niveau, l’essentiel du trafic s’effectue par les nationales… saturées. Résultat, tout prend du temps.

La RN1 entre la capitale provinciale et Kasumbalesa. © Muriel Devey

La RN1 entre la capitale provinciale et Kasumbalesa. © Muriel Devey

Publié le 9 juin 2012 Lecture : 5 minutes.

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Le Katanga grandeur nature

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Chaque jour, dans les deux sens, 300 à 400 camions empruntent la RN 1 entre Nguba, Likasi, Lubumbashi et Kasumbalesa (le poste-frontière avec la Zambie), et la RN 39 entre Likasi, Fungurume et Kolwezi. S’ils ne représentent qu’une infime fraction du réseau routier katangais, ces deux tronçons, qui forment l’épine dorsale du réseau dans le bassin minier, sont les plus empruntés. Les trajets ne sont pas toujours faciles à effectuer, l’état de ces axes routiers étant inégal selon les tronçons.

Reconstruction totale

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Katanga infographieLa portion de la RN 1 entre Kasumbalesa et Likasi, via Lubumbashi, est la mieux lotie. Remise à niveau dans le cadre du Programme multisectoriel d’urgence, de reconstruction et de réhabilitation, financé par la Banque mondiale, elle reste cependant inadaptée au trafic actuel. « La réhabilitation a été conçue pour un trafic léger. Avec le développement de la production minière, il faut renforcer cette route pour qu’elle puisse supporter des charges plus lourdes », explique Laurent Kahozi Sumba. Pour que ce tronçon réponde aux standards requis, des travaux vont donc être engagés prochainement, dont la réalisation a été confiée à la China Railway Engineering Corporation (Crec).

La partie de la RN 39 reliant Likasi à Kolwezi, centre nerveux de l’exploitation minière, en fort mauvais état, exige quant à elle une totale reconstruction. Le chantier, incluant la réalisation d’un pont (confiée à la Crec) est en cours. Ces travaux vont contribuer à améliorer le trafic, mais ils ne suffiront pas à le fluidifier totalement. Actuellement, les véhicules sont obligés de passer par les villes, où les voiries ne sont pas adaptées et la circulation souvent bloquée aux heures de pointe. D’où une perte de temps pour les transporteurs et les particuliers. La construction d’une voie de contournement, qui permettra d’éviter le chef-lieu du Katanga, devrait améliorer les choses. D’autres chantiers ont été engagés sur la RN 5, qui relie Lubumbashi et Kalemie, via Pweto. Le tronçon Lubumbashi-Kasameno a été asphalté, et celui entre Kasameno et Kalemie, principal port sur le lac Tanganyika, sera reconstruit en terre, dans le cadre du projet Pro-Routes financé par la Banque mondiale. De quoi améliorer les échanges dans cette partie du territoire et stimuler la production agricole et halieutique sur les lacs Moero et Tanganyika.

Train très lent

Cependant, bien que le schéma de transport routier pour le Katanga prévoie la réhabilitation des grands axes nord-sud et la construction de transversales, aucun chantier prévu dans ce cadre ne démarrera dans l’immédiat, faute de financements. Du coup, d’importantes zones resteront enclavées encore longtemps, au grand dam des agriculteurs et des éleveurs.

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Ces derniers, à l’instar des miniers, ne peuvent guère compter sur le chemin de fer, qui irradie pourtant la province. Une voie principale relie en effet le port d’Ilebo, sur la rivière Kasaï, à Lubumbashi et à Sakania, près de la frontière zambienne. Depuis cet axe, à hauteur de Tenke, une bretelle ferroviaire permet (via Kolwezi et Mutshatsha) de rallier Dilolo, à l’extrême Ouest katangais, puis l’Angola. Partant de Kalima, une autre bretelle fait la liaison avec le nord-est de la province, jusqu’à la fourche de Kabalo, dans le Tanganyika, pour rejoindre soit la ville portuaire de Kalemie soit Kindu, le chef-lieu du Maniema, province voisine.

Le maillage est donc satisfaisant, mais, faute d’investissements et d’entretien depuis plus de deux décennies, le réseau et le matériel roulant sont très délabrés. Quelques projets financés par la Banque mondiale ont permis à des miniers et à la société de logistique Impala, filiale du groupe Puma Energy, d’emprunter la voie ferrée. Le trafic a certes doublé, mais il reste réduit, hasardeux et très lent.

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En stand-by

L’espoir de voir le chemin de fer remis sur les rails repose sur le Projet de transport multimodal (PTM), dont 656 millions de dollars (503,9 millions d’euros), cofinancés par la Banque mondiale (via un don de 280 millions de dollars, dont 30 % sont déjà décaissés), le gouvernement congolais (176 millions de dollars) et un prêt chinois, dans le cadre du deal sino-congolais (200 millions de dollars), seront consacrés à la SNCC.

Outre le redressement de la société, 324 millions de dollars sont destinés aux investissements (réhabilitation des infrastructures et du matériel roulant, acquisition de wagons et locomotives). Excepté le volet social, qui a démarré avec la mise à la retraite d’une partie du personnel de la SNCC, et la restructuration de la société, avec la mise en place d’une gestion privée, les autres volets sont en stand-by.

La contrepartie gouvernementale tarde à être libérée, et la partie chinoise attend, pour s’engager, les résultats de l’étude de faisabilité du gisement de la Sino-Congolaise des mines (Sicomines), la coentreprise créée entre la Gécamines et des entreprises chinoises… « Si nous n’obtenons pas les fonds chinois, il faudra reformuler le projet », s’inquiète Laurent Kahozi Sumba.

« Lshi » en mode aérien

Luano, l’aéroport international de Lubumbashi (« Lshi » en abrégé), prend de l’envergure. Pour faire face à l’intensification du trafic, liée au redéploiement du secteur minier et au bouillonnement d’activités, un programme financé par la Banque africaine de développement (BAD) et le gouvernement congolais a été engagé. Il comprend la réhabilitation de la piste, ainsi que la construction d’une nouvelle aérogare et d’une nouvelle tour de contrôle.

Outre les liaisons intra- et intercontinentales, assurées par Kenya Airways, Ethiopian Airlines et South African Airways, et des compagnies locales comme Itab (qui effectue des rotations entre les centres miniers de la province) et la Compagnie africaine d’aviation (CAA, d’envergure nationale, mais qui dessert aussi des villes du Katanga), Luano accueille aussi deux opérateurs supplémentaires depuis le premier trimestre 2012 : Fly Congo et Korongo Airlines.

Autorisé en février dernier à reprendre les activités d’Hewa Bora Airways – suspendu après le crash survenu le 8 juillet 2011 à Kisangani -, Fly Congo a démarré ses vols entre Lubumbashi et Kinshasa le 26 mars. La relance de la compagnie s’est accompagnée d’une recomposition de l’actionnariat (avec le départ de l’ex-PDG d’Hewa Bora, Stravos Papaioannou), d’une restructuration des activités et de l’acquisition de cinq appareils, dont la maintenance lourde est effectuée par Jetworx, en Afrique du Sud.

Basé à Lubumbashi, Korongo Airlines a démarré ses activités le 16 avril dernier. Son capital de 11,5 millions de dollars est détenu à hauteur de 70 % par un holding composé du groupe George Forrest International et de Brussels Airlines (35 % chacun), et à 30 % par des Congolais. Ses trois appareils (un Boeing 737-300 et deux British Aerospace 146) desservent, au départ de Lubumbashi, Kinshasa et Johannesburg. Suivront Kolwezi et Goma. Plus tard, Korongo Airlines envisage de mettre le cap sur des destinations sous-régionales, dont Entebbe (Ouganda), Lilongwe (Malawi) et Lusaka (Zambie). M.D.

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