Qatar : Cheikha Al Mayassa, l’art en Majesté

Cheikha Al Mayassa, la fille de l’émir Al Thani, préside l’Autorité des musées du Qatar et oriente la politique culturelle du pays. Avec beauté, brio et… des moyens illimités.

À elle, les arts et la culture, pièces majeures dans l’arsenal du « soft power » qatari. © AFP

À elle, les arts et la culture, pièces majeures dans l’arsenal du « soft power » qatari. © AFP

ProfilAuteur_LaurentDeSaintPerier

Publié le 19 avril 2012 Lecture : 3 minutes.

Il y a l’émir Hamad, à la tête du Qatar. Il y a son cousin, Hamad Ben Jassem, le puissant Premier ministre, qui règne sur la politique étrangère et les investissements. Il y a son fils, Tamim, prince héritier et président du Comité olympique du Qatar. Il y a son épouse favorite, l’élégante Mozah, qui supervise les domaines éducatif et humanitaire. Et il y a Al Mayassa, sa fille, son quatorzième enfant, présidente de l’Autorité des musées du Qatar (QMA). À elle, les arts et la culture, pièces majeures dans l’arsenal du soft power qatari.

Fin 2011, le magazine Art & Auction sacrait cette ravissante princesse de 29 ans « personnalité la plus influente du monde de l’art ». Sans surprise : en juillet, The Art Newspaper avait révélé que le petit État du Golfe est devenu le plus gros acheteur d’art contemporain. Car l’émir souhaite faire de sa capitale une nouvelle Florence. Alors qu’à Abou Dhabi les projets de Louvre et de Fondation Guggenheim s’enlisent, sa fille gère avec brio le chantier qatari.

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Son arrivée à la tête de la QMA a coïncidé avec l’ouverture, en 2008, d’un splendide musée d’Art islamique. Depuis, la princesse a inauguré le Mathaf, un musée d’art arabe moderne et contemporain, et elle suit de près les travaux de l’architecte Jean Nouvel, dont le Musée national, en forme de rose des sables, devrait être achevé en 2014.

Sous son égide, les programmations de l’émirat font pâlir d’envie les capitales mondiales de l’art. En décembre 2011, l’événement phare a été la présentation de l’oeuvre monumentale du sculpteur Richard Serra, un dolmen d’acier brut de 24 m dressé au milieu de la baie de Doha, commandé au maître par Al Mayassa en personne. En ce moment, les expositions du Japonais Takashi Murakami et du Chinois Cai Guo-Qiang font sensation. D’Orient ou d’Occident, la princesse parvient à attirer les plasticiens les plus cotés. Et les crédits illimités dont elle dispose permettent toutes les lubies. En février, la QMA a affolé le marché de l’art en s’offrant Les Joueurs de cartes de Cézanne pour, dit-on, 250 millions de dollars : le tableau le plus cher de l’Histoire.

Sciences-Po Paris

« J’incarne l’essor culturel de mon pays », a confié Al Mayassa en 2010, qui n’a pourtant pas reçu de formation artistique. Licenciée ès sciences politiques et en littérature à l’université Duke (États-Unis), elle est brièvement passée par Sciences-Po Paris, et ses activités associatives la prédisposaient davantage aux relations internationales qu’à la fréquentation des ateliers d’artistes. Mais à Doha, la séparation des rôles est stricte : aux messieurs le sport, le business et la politique, aux dames la culture, l’éducation et l’humanitaire.

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Al Mayassa s’entoure alors des meilleurs conseillers, comme Edward Dolman, l’ancien président de Christie’s, débauché en juin 2011. Et, comme elle l’avoue elle-même, son équipe propose, l’émir dispose. Ses rares interventions disponibles sur internet sont l’écho fidèle de la doxa qatarie : dialogue des civilisations et attachement aux traditions. Mais, ces derniers temps, son goût pour la diplomatie refait surface. Révélé par le Guardian, le piratage des boîtes mails du président syrien Bachar al-Assad et de son épouse Asma a mis au jour un échange entre la femme du dictateur et la fille de l’émir : « C’est le bon moment pour partir et recommencer une vie normale », écrivait la princesse à son amie le 11 décembre dernier. Il semble hélas qu’Al Mayassa ait plus de talent pour les transactions artistiques que pour les transitions politiques.

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