L’Algérie sans illusions sur la promesse de Bouteflika de rajeunir le pouvoir

Le président algérien Abdelaziz Bouteflika, réélu pour un quatrième mandat, est attendu sur sa promesse de donner le pouvoir à la nouvelle génération mais les jeunes, majoritaires dans le pays, sont sceptiques.

Un supporter du président algérien, Abdelaziz Bouteflika, à Alger le 18 avril 2014. © AFP

Un supporter du président algérien, Abdelaziz Bouteflika, à Alger le 18 avril 2014. © AFP

Publié le 19 avril 2014 Lecture : 3 minutes.

"Bouteflika est habité par le désir du pouvoir. Sa génération ne va jamais accepter de se retirer pour céder la place aux jeunes, sa promesse de leur passer le flambeau, c’est de la poudre au yeux,", estime, dubitatif, Kamel, un élu de l’opposition, âgé de 36 ans.

"Le bouteflikisme a gagné"

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Au pouvoir depuis 15 ans, affaibli par la maladie, M. Bouteflika, 77 ans, a été réélu sans surprise par 81,53% des voix dès le premier tour jeudi. Durant la campagne qu’il n’a pas menée lui-même, ses émissaires électoraux ont insisté sur sa volonté de rajeunir le personnel politique mais aussi l’encadrement technocratique et militaire. Son directeur de campagne Abdelmalek Sellal, a déclaré à l’AFP que le chef de l’Etat allait donner le pouvoir à la génération née après l’indépendance en 1962 dans ce pays où les principaux dirigeants sont tous des septuagénaires. Mais la promesse laisse sceptique comme le constate Le Quotidien d’Oran pour qui "le bouteflikisme a gagné" avec le scrutin de jeudi, décrivant ce phénomène comme "une peur de l’avenir, du mouvement, de la rupture", une "inertie sucrée" à coups de dépenses sociales faramineuses. Avec cette victoire, "on perd la chance d’une belle transition et d’une rupture douce, on repousse l’avenir", ajoute le journal.

Durant la campagne, les émissaires électoraux de M. Bouteflika ont répété des slogans le présentant avec des allures quasi messianiques. "Il a propulsé l’Algérie au septième, voire au huitième ciel", s’est enflammé vendredi le ministre de l’intérieur, Tayeb Bélaïz, après avoir annoncé sa victoire. M. Sellal a répété à plusieurs reprises que Bouteflika avait "sorti l’Algérie des ténèbres vers la lumière" et qu’il était un "don de Dieu".

Consolidation du statu-quo 

Des internautes, railleurs, ont lancé un concours de la chitta (brosse) d’or pour récompenser ses partisans les plus obséquieux. Avec de tels arguments, "il n’y aucun espoir que le système en place depuis l’indépendance puisse changer en l’espace d’un seul mandat", estime Zahia, 34 ans, médecin dans un établissement public. "Il faut beaucoup de temps pour déraciner ce système", parie-t-elle en estimant que le changement aurait dû commencer par "l’élection d’un homme pas très âgé et jouissant de toute ses capacités physiques alors que Bouteflika est âgé et très malade".

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En accomplissant son devoir électoral jeudi, M. Bouteflika est arrivé en fauteuil roulant au bureau de vote et a dû être accompagné dans l’isoloir. "Il entendait jouer sur le sentiment de compassion des Algériens qui n’aiment pas contrarier les malades", a analysé le politologue Chafik Mesbah, ancien officier du renseignement. Selon lui, le chef de l’Etat ne s’est pas soucié de l’effet désastreux que cette image allait provoquer à l’étranger.

Le politologue Rachid Grim dit "ne pas voir de jeunes apparaitre dans le système actuel". "Il est clair que la reconduction de Bouteflika consacre la continuité", a-t-il critiqué. "La reconduction de Bouteflika va consacrer la consolidation du statu quo", renchérit le politologue Rachid Tlemçani. Mais "il doit certainement procéder à une révision de la Constitution" dont les grandes lignes dépendent du "deal conclu entre les différents clans du pouvoir" autour de la candidature de M. Bouteflika pour le 4e mandat qu’il vient de remporter.

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"Bouteflika est malade et ne peut pas diriger le pays. Après sa reconduction, l’Algérie sera entre les mains du clan qui a pris en otage le pays depuis son AVC", en avril 2013, regrette M. Tlemçani.

(AFP)

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