Libye : dans l’horreur de l’hôpital de Syrte

Malaise à l’hôpital de Syrte après la découverte de neufs corps dont le personnel médical ne sait rien.

Un médecin libyens près d’un combattants pro-kaddafi, le 9 octobre 2011. © Aris Missinis/AFP

Un médecin libyens près d’un combattants pro-kaddafi, le 9 octobre 2011. © Aris Missinis/AFP

Publié le 16 octobre 2011 Lecture : 3 minutes.

Le docteur Milad guide ses visiteurs dans l’hôpital de Syrte que son équipe tente de remettre sur pied quand soudain se répand une odeur pestilentielle: sous une fenêtre, neuf cadavres pourrissent au soleil. Ils sont là "depuis trois jours" et personne ne sait rien d’eux.

"Je ne sais pas d’où ils viennent ni qui les a déposés là. Désolé, ma priorité ce sont les vivants, pas les morts", s’excuse Abdelatif Milad avant de tourner les talons pour poursuivre sa tournée.

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Dans ce grand hôpital du sud de Syrte, bastion Kadhafiste assiégé par les combattants du nouveau pouvoir libyen depuis un mois, la macabre découverte ne fait qu’ajouter au malaise ambiant. Pris par les brigades du Conseil national de transition (CNT) il y a une semaine, l’établissement, gravement endommagé dans les combats, abritait alors plus d’une centaine de blessés soupçonnés d’être à la solde de Mouammar Kadhafi.

Depuis, le personnel médical envoyé en renfort s’efforce de réhabiliter l’hôpital Ibn Sina, criblé de trous d’obus. Quant aux patients, une majorité a été évacuée, sous la pression d’organisations humanitaires internationales. Néanmoins, 26 blessés, aux plaies souvent infectées, sont encore dans le bâtiment dans l’attente d’être opérés.

La Croix-Rouge et Médecins sans Frontières sur place

La Croix-Rouge et Médecins sans Frontières sont venus inspecter les lieux pour s’assurer notamment que ces patients trouvés par le CNT sont bien traités malgré leur étiquette d’"ennemis". "La forte présence étrangère fait office de protection", commente Barbara Fredericks, coordinatrice MSF à Misrata. Derrière elle, un jeune homme au corps et au visage ravagés par les brûlures erre dans le couloir.

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"On a déjà évacué 35 personnes vers Misrata et Tripoli en trois jours", affirme Karen Strugg, chef du bureau de la Croix-Rouge à Misrata. Les autres devraient pouvoir partir dès lundi.

Dans la cour de l’hôpital jonchée de détritus et de débris, une petite équipe de médecins a reçu l’ordre d’envelopper dans des sacs blancs les neuf corps en décomposition, posés sur des brancards en-dessous desquels s’agite la vermine. Dans un nuage de mouches, l’un d’eux, blouse bleue, masque chirurgical et gants en latex, effectue des prélèvements en vue d’identifier ces inconnus vêtus d’habits civils, sans aucun papiers sur eux.

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Des corps mystérieux

"Au moins trois ont reçu une balle dans la tête", affirme le Dr Imad Al-Fassi. Un autre a le crâne défoncé, constate une journaliste de l’AFP. Selon les médecins, la mort remonterait à "au moins une semaine". Personne à l’hôpital ne semble savoir qui sont ces morts, qui les a tués ni ce qu’ils font au pied de ce mur.

Une demi-heure plus tard, plusieurs membres d’une ONG libyenne de "soutien médical et d’aide à l’armée nationale" arrivent à l’hôpital. "Nous sommes là pour récupérer les corps. Certains ont été exécutés. Nous devons les enterrer", explique Faraz Mahdawi. S’il reconnaît ignorer leur identité, ce médecin en est persuadé: ces hommes sont des combattants pro-CNT et ont été abattus par les forces du "Guide" déchu.

En l’absence de preuve, un observateur étranger semble plus circonspect. "Ca pourrait aussi être l’inverse, difficile à dire sans les tests ADN", souligne-t-il. "Ce type d’affaire va probablement se multiplier, il faut absolument tout vérifier avant d’affirmer quoique ce soit", conclut-il, alors que circulaient samedi des rumeurs selon lesquelles 18 corps, exécutés, auraient été trouvés dans la ville, non loin de l’hôpital.

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