Libye : Tripoli rejette le cessez-le-feu proposé par les insurgés

Le site pétrolier de Brega, dans l’est de la Libye, a été vendredi le théâtre d’intenses combats entre les forces de Mouammar Kadhafi et les rebelles, qui ont proposé un cessez-le-feu sous certaines conditions, rejetées par Tripoli dans la soirée.

Des rebelles libyens près de Brega, le 31 mars 2011. © AFP

Des rebelles libyens près de Brega, le 31 mars 2011. © AFP

Publié le 2 avril 2011 Lecture : 4 minutes.

A Benghazi, fief des rebelles à 1.000 km à l’est de la capitale, Moustapha Abdeljalil, chef du Conseil national de transition (CNT) mis en place par la rébellion, s’est dit prêt à respecter un cessez-le-feu, à deux conditions: "que nos frères dans les villes de l’ouest puissent s’exprimer librement et que les forces (pro-Kadhafi) qui assiègent nos villes se retirent".

Mais Tripoli a rejeté ces conditions vendredi soir, affirmant que les troupes gouvernementales ne quitteraient pas les villes qu’elles contrôlaient.

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"Les rebelles n’ont jamais offert la paix. Ils font des demandes impossibles", a déclaré Moussa Ibrahim, porte-parole du régime, estimant que la proposition des rebelles était "une ruse". "Nous ne quitteront pas nos villes. C’est nous le gouvernement, pas eux", a-t-il insisté, réaffirmant toutefois que le régime était prêt à la paix et au dialogue.

En milieu de journée, la ligne de front se situait à 800 km à l’est de Tripoli, aux environs de Brega, mais il était impossible de savoir de source indépendante qui contrôlait la localité, selon des journalistes de l’AFP.

Des civils tués

Onze personnes dont huit civils ont péri en trois jours dans la zone disputée, selon des sources médicales à Ajdabiya, à 80 km à l’est de Brega: cinq civils sont morts mercredi, trois jeudi et trois rebelles vendredi.

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Les versions divergeaient cependant sur les circonstances exactes de la mort des civils, l’une affirmant qu’ils avaient été tués dans des raids aériens de la coalition internationale et l’autre disant qu’ils l’avaient été par les forces du colonel Kadhafi.

Tripoli a accusé vendredi soir la coalition internationale de commettre des "crimes contre l’humanité" en bombardant des civils, notamment dans l’est. Selon Moussa Ibrahim, six civils ont été tués jeudi par des frappes de la coalition à Bouargoub, un petit village près de Brega.

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En fin d’après-midi, les combats à l’artillerie lourde continuaient, les rebelles utilisaient des lance-roquettes multiples de gros calibre, et le bruit des détonations résonnait jusqu’à Ajdabiya.

Après avoir battu en retraite sous les bombardements de la coalition internationale, les troupes de Mouammar Kadhafi ont marqué des points sur le terrain ces derniers jours, reprenant plusieurs localités aux insurgés, en particulier le site pétrolier de Ras Lanouf.

Elles poursuivaient vendredi leur offensive à coups d’obus de chars et de roquettes sur la ville rebelle de Misrata, à l’est de Tripoli, faisant 28 morts en trois jours, selon un porte-parole des insurgés.

La coalition internationale a mené vendredi soir des raids sur des positions des forces loyales, dans les régions d’El-Khoms (est), et El-Rojban (nord-ouest), a rapporté la télévision d’Etat.

Retrait de l’armée américaine

Vendredi, des responsables du Pentagone ont confirmé à l’AFP que l’US Army commencerait à retirer ses avions de combat et ses missiles du théâtre des opérations à partir de ce week-end pour s’en tenir, comme prévu, à un rôle de soutien, l’Otan ayant pris jeudi la direction des opérations assumées depuis le 19 mars par la coalition menée par les Etats-Unis, la France et le Royaume-Uni.

Vendredi matin, les rebelles, sous-équipés et moins bien organisés que l’armée loyaliste, ont tenté de remettre de l’ordre dans leur organisation.

Devant la porte ouest d’Ajdabiya, Abdelkarim Mansouri, 54 ans, criait les nouvelles consignes: "Plus de civils ! Plus de voitures civiles. Seuls les soldats et le ravitaillement peuvent passer !"

Il s’agit là qu’une "nouvelle tactique", a-t-il expliqué à l’AFP. "On ne veut plus que les chebab (jeunes) se fassent tuer. La guerre n’est pas une distraction".

Les puissances occidentales cherchent une solution politique plutôt que militaire au conflit, qui a éclaté le 15 février avec les premières manifestations en faveur de la démocratie à Benghazi.

"La situation en Libye ne peut pas être résolue par des moyens militaires. Il peut seulement y avoir une solution politique", a insisté le ministre allemand des Affaires étrangères, Guido Westerwelle.

Armer les rebelles libyens serait une "mesure extrême", a une nouvelle fois estimé le ministre italien des Affaires étrangères, Franco Frattini, tout en n’écartant pas cette hypothèse s’il s’agissait de "la seule option" pour protéger les civils.

Tripoli chercherait une porte de sortie

Un proche conseiller du clan Kadhafi, en visite dans sa famille à Londres, est reparti porteur d’un "message fort" du gouvernement britannique, selon une source gouvernementale à Londres. Selon le quotidien The Guardian et la BBC, Mohammed Ismail aurait été envoyé à Londres pour tenter de trouver une porte de sortie au dirigeant libyen.

L’opération militaire internationale en Libye a pour but de contrôler son pétrole et représente un "énorme danger" pour l’existence de l’Organisation des pays exportateurs de Pétrole (Opep), a estimé le ministre vénézuélien de l’Energie électrique.

Au même moment, la rébellion a annoncé avoir passé un accord avec le Qatar pour commercialiser le pétrole brut des zones qu’elle contrôle en échange de livraisons de nourriture, médicaments et carburant, précisant qu’elle espérait aussi pouvoir acheter des armes avec les revenus du pétrole.

Et l’Union européenne s’est dite prête à déclencher, si l’ONU le demandait, une opération militaire humanitaire afin de répondre à la situation de crise en Libye.

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