Libye : tirs à l’arme automatique dans le centre de Tripoli

Des tirs nourris d’armes automatiques résonnaient dimanche à l’aube dans le centre de Tripoli, où le dirigeant libyen, Mouammar Kadhafi, a une nouvelle fois brandi les spectres de l’immigration massive et du terrorisme islamique.

Un combattant de l’opposition libyenne à un poste de contrôle situé à Ras Lanouf le 5 mars 2011. © AFP

Un combattant de l’opposition libyenne à un poste de contrôle situé à Ras Lanouf le 5 mars 2011. © AFP

Publié le 6 mars 2011 Lecture : 4 minutes.

Il n’était pas possible dans l’immédiat de déterminer l’origine des tirs, nettement audibles vers 06h20 (04h20 GMT), a rapporté un journaliste de l’AFP. Ils ont été entendus depuis un hôtel situé aux abords du centre historique de la ville, à moins d’un km de la Place verte.

Tripoli, restée sous le contrôle du régime du colonel Kadhafi, a été largement épargnée par les violences depuis une semaine.

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Au 19e jour de la révolte contre Mouammar Kadhafi, l’opposition libyenne, maîtresse de l’Est du pays, a essuyé samedi une contre-offensive massive à Zawiyah, près de Tripoli, mais poursuivait sa progression vers l’ouest, et s’organisait sur le plan politique en se déclarant "seule représentante" du pays.

La télévision Al Libya, proche de Seif el-Islam, fils du colonel Kadhafi, a affirmé dimanche matin que les forces du régime avaient repris le contrôle de Misrata (ouest), Ras Lanouf et Tobrouk (est) et que d’autres forces faisaient route vers Benghazi (est), bastion de l’insurrection.

Mais selon des journalistes de l’AFP sur place et les insurgés, Ras Lanouf était toujours contrôlée dimanche matin par ces derniers.

"Il n’y a pas eu des combats dans la nuit, la ville est sous notre contrôle", ont indiqué des insurgés à l’AFP sur place.

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"Nous sommes plusieurs journalistes dans un hôtel à l’entrée ouest de la ville et nous n’avons pas entendu de bruit de combats", a ajouté de son côté un journaliste de l’AFP.

Kadhafi promet le chaos à l’Europe

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Mouammar Kadhafi s’est dit favorable à l’envoi d’une commission d’enquête "des Nations Unies ou de l’Union africaine" pour évaluer sur place la situation dans son pays, dans une interview publiée dimanche par l’hebdomadaire français Le Journal du Dimanche.

"Nous allons permettre à cette commission d’aller voir sur le terrain, sans aucune entrave", affirme-t-il.

Le colonel décrit à nouveau les jeunes insurgés comme des manipulés qui "ont pris goût à ces pilules hallucinogènes" distribuées par des hommes d’Al-Qaïda "venus d’Irak, d’Afghanistan ou même d’Algérie".

Alors que ses forces ont lancé une offensive sanglante pour reprendre des villes de l’ouest aux mains des insurgés, il assure: "nous, jusqu’à présent, nous n’avons pas pris la décision d’attaquer".

S’adressant aux Occidentaux, et en premier lieu aux Français, le colonel brandit à nouveau les spectres de l’immigration massive et du terrorisme islamique:

"Nous vous avons beaucoup aidé ces dernières années. Alors pourquoi, lorsque nous sommes dans un combat contre le terrorisme ici en Libye, on ne vient pas nous aider en retour".

Il évoque une double évolution au cas où l’Europe le laisserait tomber:

"Vous aurez l’immigration, des milliers de gens qui iront envahir l’Europe depuis la Libye. Et il n’y aura plus personne pour les arrêter", dit-il.

"Vous aurez Ben Laden à vos portes (…) Il y aura un djihad islamique en face de vous, en Méditerranée. Ils attaqueront la 6e flotte américaine, il y aura des actes de piraterie ici, à vos portes", menace-t-il.

Plus de 191.000 personnes ont fui à ce jour les violences et environ 10.000 personnes déplacées se dirigent vers la frontière égyptienne, selon l’ONU.

Attaque massive à Zawiyah, bombardements à Ras Lanouf

Sur le terrain, le bilan des victimes a continué de s’alourdir samedi. Au moins sept personnes ont été tuées et des dizaines blessées dans l’offensive gouvernementale à Zawiyah (près de Tripoli), où le nombre de morts pourrait être plus élevé, selon une source médicale.

Les forces loyalistes ont commis un "véritable massacre" à Zawiyah, a indiqué par téléphone à l’AFP un médecin d’un hôpital de la ville, contrôlée depuis le 27 février par l’opposition.

"La situation est catastrophique. Ils ont tué beaucoup de monde. Ils ont tué ma fille", a-t-il ajouté avant d’éclater en sanglots.

"Les chars sont partout dans la ville et tirent sur les habitations", selon un autre habitant de la ville.

Sur le front est, les insurgés, qui continuent leur progression vers l’ouest, sont arrivés samedi à Ben Jawad (100 km de Syrte, ville natale de Kadhafi), selon des journalistes de l’AFP.

Un nouveau raid aérien a été mené dimanche matin par les forces fidèles au colonel Mouammar Kadhafi sur la ville pétrolière stratégique de Ras Lanouf, dans l’Est de la Libye, déjà visée un peu plus tôt par un raid, a constaté un journaliste de l’AFP.

Ce raid a visé un camp des rebelles, installé dans une ancienne base militaire.

Un avion de combat avait déjà mené un peu plus tôt dans la matinée un raid aérien sur Ras Lanouf, créant deux cratères dans le sable, près d’un point de contrôle des insurgés, selon des journalistes de l’AFP sur place et des témoins.

"Il y a eu deux roquettes. Il n’y a pas de blessés, ni de dégâts", avait déclaré un des rebelles, Abdal Sharif.

Politiquement, le Conseil national créé par les représentants de l’insurrection a tenu sa première réunion à Benghazi et s’est déclaré "seul représentant de la Libye", a annoncé son président, l’ex-ministre de la Justice Moustapha Abdeljalil.

Le Conseil, dont la création avait été annoncée le 27 février, a chargé Omar al-Hariri des "Affaires militaires", et confié les Affaires étrangères à Ali Abdelaziz al-Issaoui, ambassadeur démissionnaire en Inde et ancien ministre de l’Economie.

Il a également désigné Mahmoud Jibril Ibrahim al-Wourfalli à la tête d’une "équipe exécutive pour gérer la crise".

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