Burkina : le jour d’après

Après les violentes manifestations de jeudi, la situation reste très confuse ce vendredi matin au Burkina. Blaise Compaoré n’a pas l’intention de démissionner, une transition a été évoquée par l’armée, mais aussi par le président. Nul ne sait qui détient réellement le pouvoir.

Des manifestants saccagent et incendient l’Assemblée nationale à Ouagadougou, le 30 octobre 2014. © AFP

Des manifestants saccagent et incendient l’Assemblée nationale à Ouagadougou, le 30 octobre 2014. © AFP

BENJAMIN-ROGER-2024

Publié le 31 octobre 2014 Lecture : 3 minutes.

Après les violentes manifestations de jeudi qui ont fait des victimes, dont le bilan précis n’a pas encore été annoncé, la nuit a été relativement calme dans la capitale burkinabè. Un couvre-feu a été instauré de 19h à 6h, mais n’a pas été totalement respecté, tant l’armée semble ne pas avoir la situation sous contrôle. Dans la soirée, des tirs ont résonné aux abords du palais présidentiel de Kosyam, solidement tenu par les militaires de la garde présidentielle. Quelques tirs et détonations ont ensuite été entendus dans plusieurs quartiers, notamment près du Salon international de l’artisanat de Ouagadougou (SIAO), près de l’aéroport. La plupart des manifestants étaient rentrés chez eux à la nuit tombée, laissant derrière eux une ville marquée par les pillages. 

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  • Quelle est la position de Blaise Compaoré ?
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Le président Blaise Compaoré s’est exprimé jeudi soir lors d’une brève allocution sur la chaîne de télévision privée Canal 3. S’il a affirmé avoir "compris" le message de la population et pris "la juste mesure des fortes aspirations au changement", il a toutefois refusé de démissionner, montrant au passage sa détermination à vouloir rester maître d’une situation désormais plus qu’instable. Il a annoncé qu’il comptait terminer son mandat – qui court jusqu’en novembre 2015 – pour diriger la transition et remettre le pouvoir au président démocratiquement élu. Enfin, en guise de mesures "concrètes" pour tenter de satisfaire ses opposants, le chef de l’État a ordonné la dissolution du gouvernement, la fin de l’état de siège et a demandé l’ouverture d’un dialogue avec l’opposition et les responsables de la société civile.

  • Qui tient le pays ?

Difficile de dire, ce vendredi matin, qui contrôle réellement la situation au Burkina. Jeudi soir, quelques heures avant la déclaration du président Compaoré, le général Honoré Traoré, chef de l’État-major général des armées, a annoncé la dissolution du gouvernement, mais aussi celle de l’Assemblée nationale. Il a ajouté qu’un organe transitoire allait être mis en place pour assurer un retour à la normale dans les douze prochains mois. Le discours est donc différent selon qu’on tend l’oreille vers la présidence ou l’armée, et il est encore trop tôt pour parler de coup d’État, Blaise Compaoré étant toujours officiellement président du Faso.

Autre personnalité militaire qui a resurgi à la faveur du désordre : le général Kouamé Lougué. Ancien chef d’état-major et ministre de la Défense jusqu’à son limogeage en 2004, il dispose d’un fort capital sympathie auprès des troupes et des manifestants. Il a été vivement acclamé par des milliers de personnes jeudi après-midi sur la place de la Nation, à Ouagadougou. Son influence exacte dans les tractations politiques en cours reste toutefois difficile à mesurer.

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  • Comment réagit l’opposition ?
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Les principaux leaders de l’opposition n’ont pour le moment pas de réaction coordonnée, même s’ils se sont rencontrés plusieurs fois dans la journée. Entre deux appels à la "responsabilité commune" et au respect des biens et des personnes, ils négocient avec les différents protagonistes de la crise et essaient de faire entendre leurs voix entre celles de la présidence et des militaires. Ils doivent aussi composer avec la pression de milliers de manifestants, bien déterminés à en finir avec le pouvoir en place. Plusieurs responsables de l’opposition sont loin d’être satisfaits par les annonces de "Blaise" et estiment qu’il est allé trop loin. Ainsi, pour l’opposant historique Stanislas Bénéwendé Sankara, le départ du président est désormais "un préalable non négociable".

  • À quoi s’attendre ce vendredi ?

La situation risque une nouvelle fois d’être tendue ce vendredi 31 octobre. Alors que le jour se lève sur Ouagadougou, personne ne sait concrètement qui tient le pays. De nouvelles manifestations vont probablement avoir lieu dans la capitale et les principales villes du pays. À la vitesse où les évènements ont évolué jeudi matin, personne ne sait vraiement où en sera le pays des hommes intègres ce soir.

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Benjamin Roger

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