Ebola : suspension des vols vers les pays touchés, une réponse « dangereusement inadaptée »

Les dernières compagnies aériennes qui assuraient encore la desserte des trois pays d’Afrique de l’Ouest touchés par Ebola ont presque toutes suspendu leurs vols mercredi. Une décision  « dangereusement inadaptée », selon MSF.

Un homme vêtu d’une combinaison de protection, en Côte d’Ivoire. © AFP

Un homme vêtu d’une combinaison de protection, en Côte d’Ivoire. © AFP

Publié le 28 août 2014 Lecture : 4 minutes.

Avec la suspension progressive des dernières dessertes aériennes, le Liberia, la Sierra Leone et Guinée, touchés de plein fouet par l’épidémie d’Ebola, se retrouvent chaque jour un peu plus isolés du reste du monde. Une décision "dangereuse" pour MSF.

"L’actuelle réponse internationale à Ebola reste dangereusement inadaptée", affirme la coordinatrice d’urgence de MSF en Sierra Leone dans un témoignage émouvant publié mercredi 27 août aux États-Unis. "L’épidémie d’Ebola est devenue incontrôlable depuis plusieurs mois, mais la communauté sanitaire internationale a mis trop de temps à réagir", écrit encore l’infirmière coordinatrice Anja Wolz dans le New England Journal of Medicine.

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Afin de répondre au plus vite à cette situation de crise, les ministres de la Santé des pays de la Communauté des États d’Afrique de l’Ouest (Cédéao) devraient se réunir jeudi à Accra pour discuter d’une stratégie commune de lutte contre cette maladie meurtrière.

Un bilan probablement plus lourd

Alors que le virus a fait plus de 1 400 morts (624 au Liberia, 406 en Guinée, 392 en Sierra Leone et cinq au Nigeria, selon le dernier bilan de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) arrêté il y a une semaine) sur 2 615 cas enregistrés dans la région, au Liberia, le pays le plus touché, le directeur des Centres fédéraux américains de contrôle et de prévention des maladies (CDC), Tom Frieden, a averti que le bilan était probablement bien plus lourd.

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"Le monde n’a jamais vu une épidémie d’Ebola comme celle-ci. Par conséquent, non seulement les bilans sont élevés, mais nous savons qu’il y a beaucoup plus de cas que ceux diagnostiqués ou signalés", a-t-il déclaré à Monrovia.

"Le nombre de cas augmente", a estimé le Dr Frieden, en mission dans le pays depuis plusieurs jours, ajoutant que la situation allait continuer à empirer à court terme.

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L’épidémie, qui s’est déclarée au début de l’année en Guinée, avant de se propager au Liberia et à la Sierra Leone, pays voisins, puis au Nigeria, est la plus grave depuis que cette fièvre hémorragique a été identifiée en 1976 en République démocratique du Congo (RDC), où elle est réapparue en août pour la septième fois.

Suspensions des vols

Face à l’inquiétude croissante dans le monde, Air France a annoncé la "suspension provisoire", à compter de jeudi, de ses vols vers Freetown, mais poursuivra ses liaisons avec la Guinée et le Nigeria.

Seules deux compagnies desservent encore la Sierra Leone et le Liberia. La Royal Air Maroc (RAM) qui ne change pas ses plans de vols (un par jour vers Conakry et un jour sur deux en moyenne vers Monrovia et Freetown), par "solidarité" africaine, a déclaré la compagnie.

La seconde, Brussels Airlines, en attendant de prendre une décision en fin de semaine, assure une desserte irrégulière et, dans l’immédiat, pour répondre à la demande de passagers et acheminer 40 tonnes d’aide médicale de l’ONU, a précisé assurer cette semaine trois vols : un vers Freetown, un vers Monrovia et un vers Conakry.

Quant à la British Airways, elle a  annoncé mardi prolonger jusqu’à la fin de l’année la suspension de ses liaisons avec le Liberia et la Sierra Leone.

Un appel de l’ONU pas entendu

La "très ferme requête" du coordinateur de l’ONU contre le virus Ebola, le Dr David Nabarro, pour que des compagnies aériennes continuent à desservir les capitales des pays touchés a donc rencontré peu d’écho.

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Le Dr Nabarro avait averti lundi à Freetown que "la décision compréhensible de certaines compagnies aériennes de ne plus desservir Freetown, Monrovia ou Conakry avait eu un énorme impact sur la capacité de l’ONU à acheminer du personnel et du matériel".

Une centaine de tonnes de matériel de santé et d’hygiène financées par la Banque mondiale ont néanmoins été livrées mardi au Liberia par l’Unicef.

"Solidarité africaine"

Le président gambien Yahya Jammeh a pour sa part fait don à la Sierra Leone de 500 000 dollars (380 000 euros).

"En des moments comme celui-ci, nous attendons des pays africains et des organisations comme la Cédéao et l’Union africaine qu’elles resserrent les rangs et fassent preuve de la même solidarité que le président de Gambie", a commenté le chef de l’État sierra-leonais, Ernest Bai Koroma.

La Grande-Bretagne a également offert 10 millions d’euros pour les services de lutte contre Ebola, selon l’ambassadeur en Sierra Leone, Peter West.

Le Dr Nabarro a poursuivi sa tournée des pays touchés, en se rendant mercredi au Nigeria, le moins touché par Ebola.

À l’occasion de sa rencontre avec le médecin, le président nigérian, Goodluck Jonathan, a condamné la stigmatisation qui frappe le Nigeria, dénonçant le fait que l’équipe nigériane a été contrainte de se retirer des jeux Olympiques des jeunes en Chine après une décision du Comité international olympique bannissant les équipes des pays touchés par Ebola pour les sports de combat et la natation.

Le pays le plus peuplé d’Afrique restait néanmoins vigilant, reportant la rentrée des classes d’un mois pour mettre en place "des mesures préventives" contre l’épidémie.

Un premier patient traité en Allemagne

Par ailleurs, un expert sénégalais de l’OMS contaminé en Sierra Leone a été admis mercredi dans un hôpital de Hambourg, devenant le premier malade d’Ebola traité en Allemagne, et le troisième en Europe.

Un professionnel de la santé travaillant pour le CDC a quant à lui été rapatrié aux États-Unis après avoir été faiblement exposé au virus Ebola en Sierra Leone.

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(Avec AFP)

 

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