Hollande prépare le lancement de l’opération Barkhane à N’Djamena

L’opération « Barkhane », du nom de la nouvelle configuration stratégique de l’armée française dans le Sahel qui devrait mobiliser 3 000 soldats environ, sera officiellement lancée le 1er août à N’Djamena.

Patrouille française au Mali. © AFP/Sébastien Rieussec

Patrouille française au Mali. © AFP/Sébastien Rieussec

Publié le 19 juillet 2014 Lecture : 4 minutes.

À cette occasion, le général Jean-Pierre Palasset prendra ses fonctions de commandant de l’opération. Homme d’expérience, il a commandé la force Licorrne, en Côte d’Ivoire, en 2010-2011. Il a également officié en Afghanistan en 2011-2012. Il se trouve déjà au Tchad, où le président français, François Hollande, a effectué une visite officielle samedi 19 juillet, en compagnie de son ministre de la Défense, Jean-Yves Le Drian (lire encadré).

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D’ores et déjà, le basculement de l’état-major de l’opération « Serval », au Mali, vers N’Djamena, a commencé, affirme une source militaire. L’effectif des troupes françaises présentes au Tchad passera ainsi dans les prochains jours de 950 à 1 250 hommes.

La naissance de Barkhane signifie la mort des opérations Serval (au Mali) et Épervier (au Tchad), mais aussi celle de Licorne. Il s’agit, selon le ministère de la Défense d’une reconfiguration de la présence française dans toute l’Afrique de l’Ouest, dans le but de mieux répondre à la menace terroriste. Autrement dit : on garde à peu près le même nombre d’hommes, mais on change la mission et on ne conserve qu’un seul centre de commandement.

Licorne et Épervier étaient nées pour rétablir la paix en Côte d’Ivoire et au Tchad. Serval pour chasser les jihadistes du Nord-Mali. Barkhane aura un objectif unique, précise-t-on à Paris : la traque aux jihadistes dans l’ensemble du Sahel – et peut-être même au-delà.

Quatre bases principales : N’Djamena, Niamey, Gao et Tessalit

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Le nouveau dispositif concerne cinq pays du Sahel – le Tchad, le Niger, le Mali, le Burkina et la Mauritanie – et comptera quatre bases principales. Le Tchad sera le centre névralgique : c’est à N’Djamena que se trouvera le gros des troupes et l’état-major. Et c’est de la capitale tchadienne que décollent déjà les avions de chasse vers le Sahel (on en compte entre trois et six, des Mirage et des Rafale). Il y aura également une ou deux base(s) avancée(s) dans le nord, à Faya-Largeau et peut-être à Zouar.

Le Niger, où seront basés environ 300 hommes, est considéré comme le "pole renseignement". La base aérienne de Niamey abrite trois drones non armés (deux Reaper et un Harfang), des avions de renseignement ainsi que, parfois, des avions de chasse. La France devrait en outre disposer d’une base avancée dans la région de Madama, près de la frontière avec la Libye.

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Au Mali, la France aura une base à Gao et comptera un millier d’hommes. Elle disposera aussi d’une base avancée à Tessalit, près de la frontière avec l’Algérie. Enfin, elle conserve des forces spéciales susceptibles d’agir à tout moment au Burkina Faso (à Ouagadougou) et dans une moindre mesure en Mauritanie (à Atar). La base de Port-Bouët, à Abidjan, ne fait pas partie de l’opération Barkhane, mais elle servira de base logistique et de réserve de troupes en cas de besoin.

Ce nouveau dispositif doit permettre à l’armée française d’être "plus souple et plus mobile" afin de mieux lutter contre les groupes terroristes qui ont fait du sud de la Libye leur nouveau château fort leur permettant de rayonner dans l’ensemble de la région. «"On sera beaucoup plus efficaces car plus réactifs, explique un officier. C’est ce qu’il faut dans un contexte de lutte anti-terroriste, surtout dans une zone désertique." Cela signifie-t-il que les troupes françaises pourront mener des opérations dans les pays concernés sans en référer à l’avance aux autorités ? Sur ce point, les militaires français sont moins diserts.

Une présence militaire française "qui ne doit pas durer"

La France conservera aussi des bases à Djibouti, Libreville et Dakar. Les deux premières devraient voir leurs effectifs diminuer dans les prochains mois. La troisième a déjà subi une sévère cure d’amaigrissement il y a trois ans.

Cette forte présence militaire dans le Sahel a été négociée avec les pays concernés, précise-t-on dans l’entourage de Le Drian. "Tout ceci se fait en collaboration avec le G5", qui réunit les cinq pays concernés par Barkhane, et qui a été mis en place il y a quelques mois à l’initiative de la Mauritanie, explique un collaborateur de François Hollande. "Non seulement les gouvernements de ces pays sont d’accord, mais en plus, ils sont demandeurs. Ce n’était pas le cas il y a deux ans."

Un exemple : à l’époque, Mahamadou Issoufou, le président du Niger, s’opposait à une présence militaire française, aussi minime soit-elle, sur son territoire. Aujourd’hui, il s’en réjouit et certains, dans son entourage, demandent même à ce que les drones qui décollent de Niamey soient armés.

Pour Idriss Déby Itno, le président tchadien, cette réorganisation est "essentielle" mais elle ne doit pas durer. "La France ne peut pas continuer à être toujours aux côtés des Africains pour trouver des solutions à des crises ou à des menaces. Il est temps que des Africains aient leur propre dispositif sécuritaire."

Rémi Carayol, envoyé spécial à N’Djamena

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