Tunisie : les élections vues par la blogosphère

Partie prenante de la Révolution tunisienne, la blogosphère – dont une dizaine d’acteurs se sont présentés à l’élection constituante – est considérée avec attention dans le pays. Comment a t-elle réagi au succès d’Ennahdha ? Tour d’horizon.

Vote à Tunis le 23 octobre. © Reuters

Vote à Tunis le 23 octobre. © Reuters

Publié le 29 octobre 2011 Lecture : 3 minutes.

Alors que la presse française s’inquiète du succès des islamistes d’Ennahdha aux élections de l’Assemblée constituante, le web s’agite également de l’autre côté de la Méditerranée. La communication des candidats, les alliances entre partis et autres joutes politiques sont passées au crible par les blogueurs. Et si, à l’image de l’Assemblée constituante tunisienne, aucune majorité absolue ne se dessine sur la Toile, plusieurs tendances s’y esquissent .

« La victoire d’Ennahdha est plus la conséquence de la défaite des laïcs que de son propre succès. » Ce point de vue, exprimé par un blogueur de Djerba, de nombreux membres de la blogosphère tunisienne le partage. Et pour une multitude d’internautes, la défaite des laïcs aux élections du 23 octobre s’expliquerait par leur campagne ratée. Pour le blog l’Observatoire politique tunisien, l’échec du Parti démocrate progressiste (PDP) est ainsi dû à « une politique de communication qui s’est construite en négatif du parti d’Ennahdha. (…) Les polémiques sur le plafond de financement et sur la publicité politique leur a fait perdre un capital sympathie trop important pour espérer diriger le pays. »

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Même son de cloche chez le blogueur Nawras qui avance, « une partie des électeurs qui se sont tournés vers Ennahdha ont eu peur pour leur religion, notamment après les polémiques autour de Nesma TV lancées par les partis de gauche. »

La "mauvaise campagne" du PDP

Mais si la « mauvaise campagne » du PDP et des autres partis laïcs a, selon les internautes, largement contribué à la victoire du parti de Rached Ghannouchi, un autre facteur est mis en avant : l’image de « martyr » d’Ennahdha sous le régime de Ben Ali.

Sur le très populaire blog Thala solidaire, qui vise à « rassembler toutes les voix des indignés », le succès du parti islamiste y est expliqué de la sorte. « Ennahdha est la formation la plus enracinée, la plus ancienne, la plus organisée et la principale victime de la répression antireligieuse du régime Ben Ali. Interdite il y a encore huit mois, elle possède une image d’organisation martyre qui lui a valu de grands courants de sympathie dans le corps électoral. » 

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"Déconstruire un mythe"

La poussée victorieuse des islamistes inquiète pourtant certaines plumes du web.  Sur l’excellent Carnet d’un voyageur de la Méditérranée, Barberousse s’inquiète que « le plébiscite » d’Ennahdha repose sur « des peurs » auxquelles le parti pourrait « recourir » pour se maintenir au pouvoir.

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D’autres blogueurs veulent, eux, minimiser le succès des troupes de Rached Ghannouchi. C’est le cas de Xander sur sa plateforme Delirium optimum : « Il est aujourd’hui urgent de déconstruire le mythe que ce parti essaie d’édifier et de nous imposer. Non Ennahdha n’est pas majoritaire et ne représente pas l’opinion de la majorité des tunisiens. Il ne rassemble tout au plus que 30% de la population. »

"Un signe fort pour la démocratie"

Au sein de la blogosphère, comme dans la société tunisienne, le débat autour de la future arrivée des islamistes au pouvoir est passionné et divise logiquement les internautes. Un net consensus se dégage néammoins pour qualifier ces élections « de réussite et d’un signe fort pour la démocratie. »

« Nous avons réussi la première révolution pacifique du monde arabe, nous avons réussi les premières élections libres du Printemps arabe, il n’y a aucune raison pour ne pas réussir notre première expérience démocratique », peut-on lire dans « Ennahdha ou l’utilité de son succès en Tunisie », un billet teinté d’optimisme sur le blog Winds of TN.

Un optimisme contrebalancé par Slim Amamou, figure emblématique de la blogosphère pour son combat contre la censure sous le régime de Ben Ali. «On ne peut plus donner carte blanche à une majorité pour voter toutes les décisions. Les gens n’ont absolument pas confiance dans tous ces politiciens. » Comme un symbole d’une blogosphère qui se veut indépendante et critique.

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