Maroc : objectif Sud

Alors que la concurrence s’intensifie sur les marchés du Nord, l’Afrique devient une aire de développement stratégique pour les entreprises marocaines. Si leurs exportations et investissements y décollent, la marge de progression reste énorme

Fleuron national du BTP, Somagec a réalisé les travaux du port de Malabo en Guinée équatoriale. © Vincent Fournier/J.A.

Fleuron national du BTP, Somagec a réalisé les travaux du port de Malabo en Guinée équatoriale. © Vincent Fournier/J.A.

ProfilAuteur_LaurentDeSaintPerier

Publié le 29 juin 2011 Lecture : 4 minutes.

Maroc : un business plan africain
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Maroc : un business plan africain

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« L’Afrique subsaharienne est le prolongement géographique et stratégique de notre pays. Elle est donc pour nous un partenaire incontournable, notamment sur le plan économique, et ce, à court, moyen et long terme. Il importe, en effet, que les opérateurs marocains puissent capitaliser sur l’excellence des relations du Maroc avec plusieurs pays du Sud pour se positionner sur ces marchés émergents qui regorgent de potentiel. » Saad Benabdallah, directeur général de Maroc Export, le centre marocain de promotion des exportations, ne cache pas ses appétits africains.

Certes, l’essentiel des échanges du royaume s’effectue encore avec le continent européen, qui assure 57,6 % de ses imports et 65,3 % de ses exports. Mais la crise de 2008-2009, bien qu’elle n’ait pas directement touché le Maroc, a révélé les effets néfastes de cette trop grande dépendance et la nécessité de diversifier les partenariats internationaux. Les secteurs textile et cuir, agroalimentaire et automobile – près de 40 % des exportations – ont particulièrement souffert de la baisse de la consommation européenne. Alors que le pays continuait d’enregistrer une croissance forte (+ 4,9 % en 2009), la participation du Maroc au commerce mondial s’est contractée face à ses concurrents émergents comme le Brésil et la Chine.

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Associée à la hausse de la consommation intérieure et aux dépenses liées aux grands travaux d’infrastructures, cette mauvaise conjoncture a aggravé le déficit de la balance commerciale. Conscientes de la nécessité d’intensifier les exportations, les autorités ont lancé en 2009 la stratégie « Maroc Export Plus ». Adossée aux ambitieux plans Émergence et Pacte national pour l’émergence industrielle (dit « Émergence II »), élaborés en 2005 et 2009 pour dynamiser le tissu productif, cette stratégie vise à cibler les secteurs et produits d’exportation prioritaires, à renforcer le Maroc sur ses marchés traditionnels et à en identifier d’autres prometteurs, ainsi qu’à accompagner les acteurs de l’export.

Depuis une dizaine d’années, les politiques sectorielles mises en œuvre pour l’industrie, l’énergie, l’agriculture (Maroc Vert), la pêche (Halieutis), le tourisme (plan Azur), ou encore les technologies de l’information (Maroc Numeric) contribuent également à accroître la compétitivité internationale du pays.

Continent du futur

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Le dynamisme des marchés africains, qui a attiré dès les années 1990 les investissements des grands groupes marocains du secteur industriel, puis, dans les années 2000, de la finance et des télécommunications, n’a pas échappé aux autorités économiques. Celles-ci veulent accroître le volume des exportations à destination du continent, afin qu’elles représentent 20 % des exportations du royaume en 2018 (contre 5 % en 2005 et 10 % en 2010). Rabat n’a encore aucun accord de libre-échange (ALE) avec ses partenaires subsahariens. Mais, dans le fil d’une stratégie d’intégration à l’économie mondialisée qui l’a amené à signer des ALE avec 55 pays – soit 1 milliard de consommateurs –, le Maroc poursuit ses négociations pour s’ouvrir un accès direct aux marchés des 8 États de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA).

Repères

Monnaie

Dirham (DH) 1 euro = 11,31 DH  (au 1.6.2011)

Exportations

147,9 milliards de DH

Importations

297,1 milliards de DH

Investissements en Afrique

4,43 milliards de DH, soit 91 % des investissements directs marocains à l’étranger.

Premières destinations : Mali 1,6 milliard de DH Gabon 1,3 milliard de DH Côte d’Ivoire 0,9 milliard de DH Congo 0,6 milliard de DH

L’enracinement historique du pays en Afrique et les excellentes relations diplomatiques entretenues avec de nombreux États du continent sont également des atouts pour développer des partenariats. Dès les années 1990, le puissant holding royal ONA (qui a fusionné en 2010 avec la Société nationale d’investissement ; SNI) a ainsi été pionnier dans les investissements continentaux. Pour assurer sa réussite, le Maroc compte aussi sur les compétences acquises par ses entreprises pour le développement de sa propre économie domestique et qui correspondent aux besoins de ses voisins en pleine croissance.

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Agroalimentaire, BTP, automobile, électricité, industrie pharmaceutique, textile, tourisme, finance, technologies de l’information et de la communication, services : l’expertise marocaine dans de nombreux secteurs peut servir les besoins des économies africaines, et le Centre marocain de promotion des exportations (CMPE) est actif pour favoriser les contacts entre les entreprises nationales et les sociétés et gouvernements des pays ciblés. Depuis 2009, les « caravanes de l’export » entraînent ainsi une armada d’entrepreneurs sur les routes d’Afrique subsaharienne pour faire connaître « l’offre Maroc ».

Autre stratégie gagnante, le pays vise à devenir le relais industriel, commercial et financier des multinationales qui convoitent les marchés africains, et sa place stratégique au croisement des routes commerciales attire les investissements directs étrangers (IDE) en nombre croissant. Le port en eau profonde de Tanger Med a ainsi convaincu Renault de consacrer plus de un milliard d’euros à l’implantation d’une usine de production de Logan dont la capacité doit atteindre, à terme, 400 000 véhicules par an, et qui attire à sa suite une nébuleuse de sous-traitants. 

Plateforme continentale

À l’honneur (avec l’Inde) à la 9e édition de la World Investment Conference organisée à La Baule du 25 au 27 mai derniers, le Maroc était devenu, fin mars 2010, le premier État à accéder à la catégorie Investment Grade de l’agence de notation Standard and Poor’s depuis le début de la crise financière.

« En 2010, les IDE ont augmenté de 29,5 % et le premier trimestre 2011 a été très prometteur : le profil du pays est en train de changer, le Maroc est un chantier ouvert et la dynamique est là », constate Ahmed Fassi Fihri, directeur de la promotion des investissements à l’Agence marocaine pour le développement des investissements (Amdi).

Consacrée par la refonte prochaine de la Constitution, la régionalisation est également mise au service de l’export, et les pôles d’excellence qui se créent à travers le pays pourraient, à terme, servir le continent tout entier. 

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