Dattes à l’export : la concurrence s’exacerbe

Producteurs de la  variété de datte Deglet Nour, très prisée, l’Algérie et la Tunisie se livrent une concurrence féroce pour accroître leurs parts de marché à l’international.

Culture de la datte à Blidet, dans le sud tunisien. © Nicolas Fauqué / Imagesdetunisie.com

Culture de la datte à Blidet, dans le sud tunisien. © Nicolas Fauqué / Imagesdetunisie.com

Publié le 14 décembre 2010 Lecture : 3 minutes.

Riche en vitamines et en fibres, la datte figure en bonne place des fruits bénis par la diététique… et tous les livres saints. Accentué par la mode du halal (notamment en France), l’engouement qu’elle suscite n’est pas sans exacerber la concurrence entre producteurs, notamment algériens et tunisiens. Si l’Algérie, qui dispose d’un patrimoine phoenicicole important, affiche une production annuelle de plus de 600 000 tonnes, la Tunisie, avec seulement 145 000 t par an, dont 80 % de la variété Deglet Nour, est le quatrième exportateur mondial, derrière l’Égypte, l’Iran et l’Irak, et loin devant sa voisine. La variété Deglet Nour (« doigts de lumière » en arabe) est si prisée que l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) a désigné la Tunisie, avec son 1,3 million de plants, comme le premier fournisseur du marché européen.

Estimant que la production de Tolga est la meilleure au monde, l’Algérie, avec son million de palmiers producteurs de la reine des dattes, s’est sentie dépossédée d’un statut. Par ailleurs, les Algériens dénoncent des trafics aux frontières qui mettent en danger la filière, accusent les Tunisiens de commercialiser en Europe la datte algérienne en y apposant leur label et les soupçonnent d’être en cheville avec des exportateurs français pour asseoir un monopole de la datte. Pourtant, le premier client de la Tunisie est le Maroc, suivi de la France, des pays du Golfe et des marchés émergents, tels que la Russie, la Turquie, l’Asie du Sud-Est et l’Inde. Curieusement, la France, sans être producteur, est un important exportateur. Delisud, en Alsace, réalise 4 millions d’euros de chiffre d’affaires à l’exportation, tandis que la société Armand Fabre fait deux fois mieux, dont 80 % durant le ramadan.

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Couloir vert pour l’exportation

Au-delà des querelles de minarets, le marché de la datte est stratégique pour l’économie des deux pays. En Tunisie, il représente 16 % des exportations agricoles globales, juste après l’huile d’olive et les produits de la mer, et a rapporté en 2009, malgré un faible rendement par palmier, plus de 50 millions d’euros, dont 12 millions en production biologique. L’Algérie, elle, n’a exporté en 2009 que 15 000 t, soit 2,5 % de sa production, pour une valeur de 14 millions d’euros. Dans la course à l’exportation, la Tunisie a pris une longueur d’avance sur sa voisine en s’appuyant sur une production mono­variétale, non sans conséquence sur l’écosystème et les ressources hydriques. En cinq ans, les nouvelles plantations, le rajeunissement des palmiers dattiers, la mise en place d’une traçabilité des produits, la certification européenne et l’amélioration des conditions de stockage ont permis à la Tunisie de satisfaire la demande tout au long de l’année.

La contre-performance algérienne s’explique par une série d’insuffisances en termes de financement, de mise à niveau, d’encadrement technique et de qualité de conditionnement. Mais les Algériens croient en leur produit. Salim Haddoud, président du Comité inter­professionnel de la datte, affirme ainsi que le pays va quintupler ses exportations d’ici à 2014 à la faveur d’une refonte de la chaîne logistique et des conditions de transport, qui jusqu’à présent laissaient à désirer. L’Algérie peine en effet à dégager un couloir vert pour l’exportation de sa production agricole en général et de la datte en particulier, alors que la Tunisie assure une promotion tous azimuts de ses produits, même si, comme on le souligne chez Horchani Dattes, premier exportateur privé tunisien, « la Deglet Nour est tellement demandée par les marchés de distribution que sa vente est facile ». Les Tunisiens, qui entendent conforter leur position, notamment face à l’émergence de la datte israélienne, n’hésitent pas à innover en créant des produits dérivés et misent sur la production certifiée bio. 

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