Zimbabwe : le chef de l’opposition veut détrôner la vieille garde

Il est en convaincu, l’heure du changement a sonné. À 40 ans, le chef de l’opposition zimbawéenne Nelson Chamisa table sur sa jeunesse pour gagner la présidentielle et débarrasser son pays de la vieille garde qui le dirige depuis près de quarante ans.

Le chef de l’opposition au Zimbabawe et candidat à la présidentielle, Nelson Chamisa, le 3 juillet à Harare. © Wilfred Kajese/AFP.

Le chef de l’opposition au Zimbabawe et candidat à la présidentielle, Nelson Chamisa, le 3 juillet à Harare. © Wilfred Kajese/AFP.

Publié le 8 juillet 2018 Lecture : 3 minutes.

Dans son bureau au cœur de la capitale Harare, le nouveau patron du Mouvement pour un changement démocratique (MDC) l’assure à l’AFP : « les jeunes dirigeants ont la cote ». « Le monde bouge, des jeunes prennent les commandes partout. Regardez la France, regardez le Canada, la Nouvelle-Zélande, les Etats-Unis », lance Nelson Chamisa, les yeux levés au-dessus de son ordinateur portable dernier cri.

Ses modèle s’appellent Emmanuel Macron, élu à 39 ans, Justin Trudeau, arrivé au pouvoir à 43 ans, et bien sûr Barack Obama, entré à la Maison Blanche quand il en avait 47. « Partout, la plupart des jeunes se retrouvent dans notre message, se retrouvent dans mon âge, dans la vision que je propose », insiste l’avocat. Nelson Chamisa s’amuse que son principal adversaire, le président Emmerson Mnangagwa, 75 ans, et son parti, la Zanu-PF, lui reprochent d’être un novice en politique.

Je suis ravi qu’ils m’accusent d’être jeune, se félicite-t-il, c’est une critique que j’accepte volontiers.

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Même s’il n’a pris qu’en février les rênes du MDC après la mort de son chef historique et mentor Morgan Tsvangirai, Nelson Chamisa n’a pourtant rien d’un « bleu » en politique.

« L’heure du changement »

Ancien dirigeant étudiant, ex-ministre du gouvernement de coalition qui a suivi les élections de 2008, toujours député, il incarne la nouvelle génération politique qui piaffait d’impatience sous le règne tutélaire de Robert Mugabe. A la tête du Zimbabwe depuis son indépendance en 1980, le chef de l’Etat, 94 printemps au compteur, se disait immortel. Mais il a fini part tomber en novembre, lâché par les militaires et son parti qui s’inquiétaient des ambitions politiques de plus en plus insistantes de son épouse Grace.

L’état-major de l’armée et les caciques de la Zanu-PF ont assis sur le trône du « camarade Bob » son ancien vice-président tombé en disgrâce, Emmerson Mnangagwa. Huit mois plus tard, Nelson Chamisa est persuadé que cette révolution de palais marque le début d’une nouvelle ère. « L’heure est au changement, je le sens presque partout. Les attentes des gens sont très claires, ils savent que (Mnangagwa) représente le passé et que j’incarne l’avenir », assure-t-il, sûr de lui, « je ne vois pas comment Mnangagwa pourrait nous battre, il va finir très loin derrière nous ».

Derrière ces propos d’estrades, le poids politique réel de l’opposition reste toutefois à démontrer. La bataille acharnée qui s’est jouée à la tête du MDC pour la succession de Norman Tsvangirai a laissé des traces. M. Chamisa l’a emportée mais sans faire l’unanimité et aura du mal à faire le plein des voix qui se reportaient sur son prédécesseur. Les sondages suggèrent aussi que la Zanu-PF dispose encore d’un fort soutien dans le nord du pays et ses zones rurales.

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« Violations »

Et puis Nelson Chamisa lui-même ne cache pas redouter la répétition des fraudes et des manipulations qui ont entaché tous les scrutins de l’ère Mugabe. Depuis des semaines, il dénonce à longueur de discours des irrégularités dans la préparation des listes électorales ou dans l’impression des bulletins de vote, ainsi que le manque d’indépendance de la Commission électorale (ZEC). « Dans le passé, nous avons subi des violations flagrantes et manifestes des droits de l’homme », dit l’opposant, « ce que nous voyons maintenant est plus subtil, plus souterrain ». Méfiant, le patron du MDC doute même de l’impartialité des observateurs de l’Union européenne (UE), autorisés à faire leur grand retour dans les bureaux de vote zimbabwéens pour la première fois depuis leur expulsion en 2002.

« Nous sommes très circonspects », avoue-t-il, « nous avons le sentiment qu’ils sont tombés dans le piège de la rhétorique de M. Mnangagwa, qui répète que les élections seront libres et honnêtes alors qu’en fait elles ne le sont pas ». Malgré toutes ces réserves, M. Chamisa se dit « très optimiste ». « Nous allons gagner haut la main », repète-t-il. À condition toutefois que le scrutin se déroule normalement, ajoute le candidat du MDC. Sinon, il s’en retirera. « Nous n’accepterons pas la répétition des élections où mon prédécesseur a été volé », menace Nelson Chamisa.

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En 2008, les violences contre ses partisans avaient contraint Morgan Tsvangirai, arrivé en tête au premier tour, à se retirer pour laisser la victoire à Robert Mugabe.

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