L’Algérie vers plus de protectionnisme et de dépenses publiques, malgré les critiques

Le gouvernement algérien prévoit le rallongement des budgets de plusieurs départements ministériels, ainsi que des augmentations tarifaires à l’importation de biens. L’information, révélée par TSA Algérie, risque de ne pas plaire aux institutions internationales adeptes de l’orthodoxie budgétaire.

Ahmed Ouyahia, ex-Premier ministre algérien. © Magharebia/CC/Flickr

Ahmed Ouyahia, ex-Premier ministre algérien. © Magharebia/CC/Flickr

Publié le 4 mai 2018 Lecture : 3 minutes.

Les mises en garde de la Banque mondiale et du FMI n’y ont rien fait. Épinglé sur sa politique économique protectionniste, le gouvernement algérien a présenté, mercredi 3 mai, l’avant-projet d’une loi de finances complémentaire, qui risque encore de faire réagir les adeptes de l’orthodoxie budgétaire. Augmentation des taxes douanières, rallongement des budgets de plusieurs ministères, dont le sacro-saint ministère de la Défense… Le texte, examiné par le Conseil du gouvernement de mercredi 2 mai et dont TSA Algérie a pu se procurer en exclusivité, entend introduire des mesures « adaptées » à une situation socio-économique difficile. Il doit par la suite passer en Conseil de ministres, puis à l’Assemblée nationale populaire (ANP) avant d’être adopté. Voici ses trois principales nouveautés.

Rallonges budgétaires pour certains ministères

Au total, le projet de Loi de finances complémentaire prévoit 500 milliards de dinars – soit 4,3 milliards de dollars – de rallonges budgétaires pour cinq ministères clés. Le ministère de la Défense nationale, plus gros poste de dépenses de l’État algérien, verra son budget augmenter de de 312 millions de dinars, pour atteindre les 1118 milliards de dinars, soit 9,6 milliards de dollars.

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En pleine période de crises sociales, l’exécutif a également revu à la hausse les budgets des ministères concernés. Le ministère de la Jeunesse et des sports, un secteur jugé « très sensible » par le ministre lui-même, sera doté de 3,65 milliards de dinars supplémentaires, soit près de 32 millions de dollars.

Alors que les médecins résidents ont décidé de mettre fin aux gardes de nuit à partir du 2 mai, pour dénoncer la situation critique des hôpitaux du pays, le gouvernement prévoit une hausse du budget du ministère de la Santé de 3,16 milliards de dinars, soit 27 millions de dollars de plus.

Enfin, le ministère des Affaires étrangères aura plus d’1,5 milliard de dinars en plus, soit 13 millions de dollars, et l’Éducation nationale 91 millions de dinars supplémentaires, l’équivalent de 800 millions de dollars.

L’importation lourdement taxée

Autre grande décision annoncée dans cette Loi de finances complémentaire, l’instauration  d’une « taxe supplémentaire provisoire préventive » sur l’importation de marchandises finies. Cette taxe douanière provisoire de 60 à 200 % entrera en vigueur en juin ou juillet 2018. Cette mesure risque de déplaire aux partenaires commerciaux du pays, notamment l’Union européenne à qui l’exécutif algérien reproche une asymétrie dans les relations économiques.

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Déjà en janvier, le gouvernement avait donné un coup de frein aux importations en bannissant près de 900 produits. Une décision qui avait provoqué des pénuries et suscité la colère des patrons. Dans une certaine confusion, l’exécutif avait alors rétropédalé le 16 avril en gelant les interdictions sur certains produits. Cette nouvelle taxe vient à nouveau confirmer la volonté du gouvernement algérien de mettre en place une politique économique protectionniste.

On dit à tous les pays qui ramenaient auparavant des produits pour les vendre, venez les fabriquer en Algérie

Mais Saïd Djellab, ministre du Commerce, défend cette nouvelle taxe, notamment au nom de la stabilité. Il a précisé que « les taxes provisoires répondent à une conjoncture exceptionnelle et sont d’une grande efficacité, alors que le changement des taxes permanentes pourrait refléter une image instable de  l’économie du pays ».

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Mercredi 2 mai, Saïd Djellab avait expliqué la nouvelle politique commerciale du gouvernement et lancé un appel aux partenaires étrangers lors d’une conférence. « On dit à tous les pays qui ramenaient auparavant des produits pour les vendre, venez les fabriquer en Algérie ».

Les concessions agricoles ouvertes aux étrangers

Enfin, le gouvernement souhaite attirer plus d’investissements dans le secteur agricole, parent pauvre de l’économie algérienne. La Loi de finances complémentaire prévoit en effet l’ouverture des concessions agricoles aux étrangers.

Cela permettra la vente – y compris par le biais de privatisations – et la cession de terres agricoles à des personnes étrangères. Des contrats de franchises pour l’exploitation de terres agricoles seront accordés à des investisseurs nationaux et internationaux dans le cadre de partenariats public-privé.

Rappleons que, dans le domaine de l’investissement privé étranger, l’État algérien garde le contrôle à travers la règle dite « 49/51 », qui interdit à un investisseur étranger de détenir plus de 49% du capital d’une société.

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