Mouvement social au Tchad : un « accord transitoire » signé entre la présidence et les syndicats
Le gouvernement tchadien a entamé des négociations avec les syndicats, et revient sur les mesures de réduction de salaire des fonctionnaires, alors que la situation budgétaire est difficile.
Faustin Dgigamnarbe, cadre du Syndicat national des enseignants et chercheurs du supérieur (SYNECS) a été reçu par son ministre de tutelle, mercredi. « Nous allons reprendre le travail. Nous sommes arrivés à un accord transitoire valable pour neuf mois, de mars à décembre », explique-t-il à Jeune Afrique. Le gouvernement a notamment accepté de payer les salaires de février et d’annuler le fameux décret 687, portant réduction des primes et des indemnités. « 1700 enseignants sont concernés », assure Faustin Dgigamnarbe.
Un communiqué devrait être émis ce jeudi 15 mars dans la soirée pour annoncer la reprise des cours, selon un militant de l’Union Nationale des Étudiants Tchadiens (UNET).
Une grève démarrée en janvier
De nombreux enseignants chercheurs étaient en grève depuis la fin janvier, comme d’autres fonctionnaires de différentes branches du secteur public. Les manifestations étaient devenues routinières et, dans plusieurs villes, des locaux du Mouvement patriotique du salut (MPS, parti au pouvoir) ont été pris pour cible par des manifestants.
La situation devenait intenable
Les syndicats avancent le nombre de 31 000 fonctionnaires n’ayant pas reçu leurs salaires en février et en janvier. « La situation devenait intenable », souffle Acheikh Ibn Oumar, opposant et ancien ministre tchadien des Affaires étrangères, qui réside à Paris. Le gouvernement s’était donné comme mission d’économiser quelques 30 milliards de francs CFA (environ 45 millions d’euros), notamment sur la masse salariale du public.
Hormis la réduction des compléments de salaires – qui peuvent représenter jusqu’au deux tiers du salaire des fonctionnaires tchadien -, les mesures destinées à réduire la facture salariale s’accompagnent d’un recensement biométrique et d’un audit des diplômes.
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« L’incapacité du gouvernement à garantir le paiement régulier des salaires et autres avantages, à plus forte raison de faire en sorte que les tribunaux, les écoles et même les hôpitaux publics restent ouverts, affaiblissent la légitimité du gouvernement actuel et exacerbent les tensions sociopolitiques », écrit le chercheur Daniel Enzenga de l’Université de Floride dans une étude publiée en février 2018 par l’OCDE.
Un contexte budgétaire difficile
Selon lui, dans un contexte de baisse des recettes pétrolières, le pays a accru ses dépenses, notamment dans le cadre de la lutte contre Boko Haram, ce qui l’a conduit dans une situation budgétaire très difficile. Les mesures d’austérités budgétaires mises en place ont conduit à des grèves dès août 2016, ce qui a forcé l’administration a déclarer l’année 2016-17 comme « blanche ».
La deuxième tranche de financement d’aide du Fonds monétaire international, dans le cadre de l’accord de facilité élargie de crédit de 312 millions de dollars conclu en juillet 2017, pourrait être débloquée prochainement en raison de la restructuation de la dette du Tchad avec Glencore.
Dans son dernier rapport, le fonds note que « depuis 2014, les autorités ont considérablement réduit toutes les catégories de dépenses, à l’exception de la facture salariale, ce qui a fait passer sa part des dépenses publiques totales à près de 50% en 2016. La facture salariale également dépassé les recettes fiscales totales hors pétrole. »
Accord Tchad mars 2018 by jeuneafrique on Scribd
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