Guinée – Littérature : Aliou Sow, l’éditeur qui fait lire la jeunesse guinéenne

Manuels scolaires, albums pour les tout-petits ou romans pour les ados, Aliou Sow, PDG-fondateur des éditions Ganndal en a fait sa spécialité. Portrait.

Aliou Sow dans sa librairie à Conakry. © François-Xavier Freland pour Jeune Afrique.

Aliou Sow dans sa librairie à Conakry. © François-Xavier Freland pour Jeune Afrique.

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Publié le 14 mars 2018 Lecture : 3 minutes.

Un chauffeur de taxi à Conakry, e,n 2014. © Youri Lenquête pour Jeune Afrique.
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La Guinée face au choc social

La croissance est forte et soutenue. Les revendications sociales le sont aussi en matière de pouvoir d’achat, d’accès aux services de base et, surtout, d’emploi des jeunes. Les Guinéens veulent du changement. Et ils le font savoir.

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Il a l’art d’éveiller le goût des enfants pour la lecture, d’ouvrir l’esprit des adolescents, et de dénicher les pépites de la littérature guinéenne (Saliou Bah, Yves Pinguilly, Kidi Bebey…). Il est aussi l’humilité incarnée. Éditeur depuis plus d’un quart de siècle, Aliou Sow, 63 ans, semble encore surpris de la notoriété qui est la sienne dans l’Afrique des livres.

Grand rêveur et pieux musulman

Après « une enfance heureuse » à Pita, dans le Fouta-Djalon, où son père était administrateur préfectoral, et des études secondaires au lycée Donka, dans la capitale, il entre à l’université de Conakry en 1971. Conquis par les vibrants discours de Sékou Touré, il devient un responsable universitaire actif au sein du Parti démocratique guinéen. « C’était une époque exaltante, avec la révolution socialiste, l’africanisation du monde, se souvient-il. Le pays se cherchait sur le plan du développement et de la gestion collectiviste, avec toute l’hostilité occidentale. »

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Grand rêveur et pieux musulman, lecteur assidu du Coran autant que des œuvres de Camara Laye et de Lamartine, le jeune homme enseigne alors la chimie organique à l’université de Conakry, puis est muté à l’Institut pédagogique national. « J’y formais des professeurs, avec du personnel est-allemand, et on faisait des tournées dans tout le pays. » En 1983, il obtient une bourse du Centre international d’études pédagogues (CIEP), en France, où il suit une formation en audiovisuel éducatif.

Ganndal [« Le savoir », en peul] est la plus ancienne maison d’édition guinéenne en activité continue

À son retour, le régime de Sékou Touré vit ses dernières heures. Aliou Sow crée alors la première radio scolaire, avec le soutien de la Francophonie. « L’emprise du régime était dure, c’était une petite fenêtre de liberté », dit-il. La carrière qu’il poursuit au sein de l’éducation nationale l’amène naturellement à la production de matériel pédagogique.

« Je me rendais compte de la pénurie de livres scolaires en Guinée, j’avais beaucoup de relations au niveau international, notamment au contact de la mission canadienne, et, en mars 1992, j’ai créé les éditions scolaires Ganndal [« Le savoir », en peul], qui est la plus ancienne maison d’édition guinéenne en activité continue. »

« Meilleur éditeur jeunesse » pour l’Afrique

Dès sa création, Ganndal se fait remarquer avec une collection de livres-CD/cassettes audio, Le Scribe et le Griot, coproduite avec un éditeur canadien et soutenue par la Francophonie, ainsi que par plusieurs pays ouest-africain.

Couverture de Bobo a peur du chien, l'une des références des albums illustrés pour enfants de la maison d'édition créée par Aliou Sow. © DR / éditions Ganndal

Couverture de Bobo a peur du chien, l'une des références des albums illustrés pour enfants de la maison d'édition créée par Aliou Sow. © DR / éditions Ganndal

Nous voulions écrire des livres africains pour des publics africains

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« La musique était signée du guitariste Jean-Baptiste Williams [actuel directeur national des arts de Guinée, NDLR] et de mon ami malien Habib Koïté. C’était presque un objet d’art et ça nous a fait connaître ! » La maison d’édition s’ouvre dans la foulée à la littérature jeunesse, puis générale. « Nous voulions écrire des livres africains pour des publics africains. Depuis, j’ai aussi publié des auteurs français pour des livres africains, se réjouit l’éditeur. Et aujourd’hui, j’arrive à payer mes auteurs ! »

Les éditions Ganndal ont fêté leur 25 ans en remportant, en avril 2017, le prix du « Meilleur éditeur jeunesse » pour l’Afrique à la Foire du livre pour la jeunesse de Bologne (Italie). Réputée pour ses ouvrages scolaires et parascolaires – en 2016, son « Cahier d’activités multimatières » a été tiré à 100 000 exemplaires et distribué sur tout le territoire -, la maison d’édition réalise un chiffre d’affaires annuel de 450 millions de francs guinéens (40 000 euros).

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Elle publie une dizaine d’ouvrages par an, diffusés en Afrique de l’Ouest, en Europe, au Canada et aux États-Unis, dont quelques-uns traduits dans les langues nationales (soussou, peul, malinké). Son catalogue compte plus de 370 titres répartis en collections, parmi lesquelles Tinka (nouvelles), La Case à Palabre (roman jeunesse) et Gos&Gars (pour les lycéens).

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