Guinée équatoriale : une soixantaine de Tchadiens interpellés après la tentative de « coup d’État »

Fin décembre, un Tchadien, Mahamat Kodo Bani, présenté comme le « cerveau » de l’opération, avait été arrêté au Cameroun.

Teodoro Obiang Nguema Mbasogo à Abuja, au Nigeria, le 29 mai 2015. © Sunday Alamba/AP/SIPA

Teodoro Obiang Nguema Mbasogo à Abuja, au Nigeria, le 29 mai 2015. © Sunday Alamba/AP/SIPA

Publié le 5 janvier 2018 Lecture : 3 minutes.

Le président Obiang Nguema. © Justin Lane/AP/SIPA
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Putsch déjoué en Guinée équatoriale : qui voulait la chute d’Obiang ?

Fin décembre, Malabo a affirmé avoir déjoué un coup d’État. Des « mercenaires » ont été arrêtés, des personnalités politiques interpellées et accusées d’avoir fomenté cette tentative de putsch. Enquête sur les dessous de cette « opération Obiang » qui a fait long feu.

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Alors que plusieurs zones d’ombre subsistent autour de la tentative de « coup d’État » menée dans la nuit du 24 décembre contre le président Teodoro Obiang Nguema, une soixantaine de commerçants tchadiens ont été interpellés ces derniers jours en Guinée équatoriale, a indiqué jeudi Paul Nahari Nguaryanan, l’ambassadeur du Tchad dans le pays.

« Mercenaires »

Les commerçants tchadiens « étaient 55 détenus hier (mercredi) à Malabo, 9 à Momgomo, et d’autres à Ebebyin », a-t-il précisé. Ces arrestations se sont déroulées au lendemain de la visite à Malabo de Mahamat Zen Cherif, le ministre tchadien des Affaires étrangères, après l’annonce par le gouvernement d’un putsch déjoué.

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Selon une source au ministère tchadien des Affaires étrangères, « une partie » des commerçants tchadiens a été libérée jeudi, après l’audience du ministre avec le président Teodoro Obiang Nguema mercredi soir à Malabo.

Mercredi, la Guinée, par la voix de son ministre de la Sécurité nationale Nicolas Obama Nchama, avait annoncé avoir déjoué un « coup d’Etat ».

Selon un communiqué, un groupe de mercenaires étrangers – en majorité tchadiens, mais aussi soudanais et centrafricains – a voulu le 24 décembre « attaquer le chef de l’État qui se trouvait dans le palais présidentiel de Koete Mongomo pour les fêtes de fin d’année ». Ce palais se trouve sur la partie continentale du pays, à une cinquantaine de km d’Ebibeyin, au carrefour des trois frontières entre le Gabon, le Cameroun et la Guinée équatoriale.

C’est dans cette zone que les « mercenaires » ont été arrêtés le 27 décembre, du côté camerounais de la frontière, selon des sources camerounaises. Les frontières de la Guinée ont été fermées à cet endroit et des renforts y ont été déployés. Mercredi, Malabo a également annoncé que des affrontements avaient eu lieu dans les forêts environnantes d’Ebibeyin entre l’armée et des « mercenaires », faisant un mort parmi ces derniers.

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Dans la même ville d’Ebibeyin, l’ambassadeur de Guinée équatoriale au Tchad, Enrique Nsue Anguesom, en villégiature pour les fêtes de fin d’année, a été interpellé le 30, selon un de ses cousins et un responsable policier.  Ni l’arrestation de M. Nsue Anguesom, ni la fermeture des frontières à Ebibeyin ou l’envoi de renforts n’ont été confirmés par les autorités de Guinée équatoriale.

« Menace sérieuse de déstabilisation »

Fin décembre, un Tchadien, Mahamat Kodo Bani, présenté comme le « cerveau » de l’opération, avait été arrêté à Douala (Cameroun), a-t-on appris jeudi de sources concordantes.

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L’homme est présenté comme un ex-général, ancien membre de la sécurité présidentielle tchadienne par une source sécuritaire camerounaise. Information démentie par un proche du ministère tchadien de la Défense qui a affirmé qu’il n’était ni général ni ex-membre de la sécurité présidentielle.

En visite à Malabo, le ministre tchadien des Affaires étrangères avait déclaré que cette tentative de « coup d’Etat » était une « menace sérieuse de déstabilisation qui concerne toute la sous-région d’Afrique centrale ». Jeudi, le ministre gabonais de l’Intérieur s’est également rendu à Malabo, pour « accentuer la coopération », a-t-on appris de source officielle.

« Il y a un vrai manque de visibilité sur ce qu’il se passe réellement », a expliqué une source diplomatique occidentale de la sous-région. De fait, toutes les informations reçues ces derniers jours à propos de la zone d’Ebibeyin l’ont été par les canaux officiels de communication gouvernementale. Facebook, Whatsapp et autres réseaux sociaux – principaux moyens de communication en Afrique centrale – sont bloqués en Guinée équatoriale.

Le pouvoir en place a affirmé que le « coup d’État » avait été orchestré par des « militants de certains partis d’opposition radicale avec le soutien de certaines puissances » étrangères.

« Montage »

Le principal parti d’opposition de Guinée équatoriale, Citoyens pour l’innovation (CI), s’est défendu mercredi de toute implication dans les troubles présumés, dénonçant un « montage », dans cette ancienne colonie espagnole de 1,2 million d’habitants dont une grande partie vit dans la pauvreté.

Depuis les élections générales du 12 novembre, où le pouvoir a obtenu 99 sièges sur 100 au parlement, le parti CI – qui dispose d’un unique siège – a dénoncé des « dizaines » d’arrestations de ses militants, dans les capitales politique Malabo et économique Bata.

Réélu pour un cinquième mandat avec 93,7 % des suffrages en avril 2016, Teodoro Obiang Nguema Mbasogo, 75 ans, dirige la Guinée équatoriale depuis 1979. « Je ne suis pas au pouvoir parce que je veux y être. Quand vous voulez, vous pouvez me dire « Président, tu as déjà travaillé beaucoup », et je m’en irai », a-t-il déclaré lors de ses vœux à la population, samedi 31 décembre.

Doyen des chefs d’Etat en exercice du continent pour la longévité au pouvoir, le président Obiang est arrivé au pouvoir par un putsch mené par des officiers qui ont renversé Francisco Macias Nguema.

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