La gouvernance, pierre angulaire de la création de valeur

Richard Arlove, directeur général d’ABAX – un prestataire international de services fiduciaires, de conseil et d’affaires basé à Maurice -, appelle à revoir et assainir les modes de gouvernance dans les entreprises africaines afin d’améliorer leur valorisation et de faciliter les processus de transmission, de cession et d’ouverture du capital.

Dans les locaux de l’entreprise Safina, à Dakar, au Sénégal. © Sylvain Cherkaoui pour Jeune Afrique

Dans les locaux de l’entreprise Safina, à Dakar, au Sénégal. © Sylvain Cherkaoui pour Jeune Afrique

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Publié le 25 juillet 2017 Lecture : 3 minutes.

Le « private equity » n’a pas plus de 20 ans d’existence sur le continent africain. Pourtant, il a déjà participé de façon décisive au développement du continent. Arrivés à l’Afrique par les télécoms et les services financiers, les fonds de private equity ont été des acteurs incontournables de la première révolution économique africaine. Depuis, ils se sont investis dans des secteurs de plus en plus divers, notamment dans les biens de consommation.

Je suis convaincu que la prochaine grande tendance du capital-investissement en Afrique portera sur les entreprises industrielles. Car c’est là que réside le vrai potentiel africain, qui reposera sur la diversification du continent, seule vraie clé de la prospérité. Mon intime conviction c’est que le private equity peut participer à l’industrialisation de l’Afrique.

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Approfondissement du marché

Je voudrais revenir sur plusieurs tendances de fond pour étayer mon argument. D’abord quelques chiffres qui donnent une idée de l’ampleur du phénomène du capital-investissement sur le continent. Selon l’AVCA, on a comptabilisé 919 investissements de private equity en Afrique sur les cinq dernières années, soit un total de 22,7 milliards de dollars. Au total, depuis 2011, les fonds ont levé collectivement 16,5 milliards de dollars.

À cette tendance générale s’ajoute un approfondissement du marché avec des fonds de plus en plus nombreux qui cherchent à diversifier leurs investissements. Pour ce faire, ils tendent à diminuer la taille du ticket moyen investi pour toucher les PME de taille plus modeste. À l’avant-garde de cette tendance, les fonds d’impact qui prennent des « tickets » compris entre quelques centaines de milliers et quelques millions de dollars. Ces fonds-là commencent à toucher le cœur de l’économie réelle africaine.

Trop souvent, les entrepreneurs et les investisseurs ne parlent pas le même langage

Plusieurs éléments sont nécessaires à l’accroissement de ce type de financement. Bien entendu, la stabilité politique et juridique, un environnement des affaires attractif et compétitif, une fiscalité raisonnable et cohérente sont autant de fondamentaux incontournables.

Mais, ce qui manque ce ne sont pas tant les projets que les projets dans lesquels il est possible d’investir. Non seulement parce que les fonds ont des exigences très élevées en matière de gouvernance et de conformité, mais aussi parce que les PME africaines sont bien souvent insuffisamment préparées pour ce type d’exigences.

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Trop souvent, les entrepreneurs et les investisseurs ne parlent pas le même langage. C’est une règle générale à travers le monde, mais c’est particulièrement le cas en Afrique où bien souvent les principes de gouvernance les plus élémentaires sont bafoués. On constate des triples systèmes de comptabilité, des dirigeants omniprésents à tous les niveaux de l’entreprise, des conflits d’intérêt flagrants dans les processus de décision, une absence de contrôle interne ou d’informatisation.

Mise à niveau nécessaire

Les chefs d’entreprises sont extrêmement à l’aise dans le système qu’ils ont créé. Pourtant, le cumul de ces dysfonctionnements finit par peser sur la croissance de leur entreprise. Surtout, et c’est un point essentiel, ces modes de gouvernance compliquent parfois irrémédiablement le processus de transmission, de cession ou d’ouverture du capital.

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Il convient donc de préparer les entreprises africaines à réaliser une première mise à niveau. Il leur faut combler le « governance gap » qui existe actuellement en se constituant ce que nous appelons dans notre métier un « governance capital ». Car en se structurant de la sorte, les entrepreneurs peuvent négocier d’égal à égal avec les investisseurs et augmenter considérablement la valeur de leur entreprise.

En somme, quel que soit le mode de financement choisi (banque, capital-investissement ou émissions obligataire sur les marchés financiers), le « governance capital » est le meilleur moyen de gagner en crédibilité, et donc en valeur d’entreprise. En fin de compte, les fonds de private equity et les marchés financiers peuvent, au-delà de leur fonction première de financement des entreprises, déboucher sur une élévation du niveau de jeu. En fixant un horizon exigeant, ils permettent une véritable montée en gamme du capitalisme africain et, pourquoi pas, la révolution du made in Africa

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