Polémique sur la fécondité en Afrique : attention aux débats stériles

Après une « réplique tellurique » à Ouagadougou, le séisme provoqué par la déclaration d’Emmanuel Macron sur la fécondité africaine continue de secouer…

fecondite_macron_1000 © Glez

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Publié le 25 juillet 2017 Lecture : 2 minutes.

Les oreilles du président Macron sifflent encore, deux semaines après ses propos sur la dimension « civilisationnelle » de l’enjeu démographique africain. C’est cette fois par ricochet que le président français est la cible de critiques acerbes. À son intervention de Hambourg, le 8 juillet dernier, a succédé la déclaration des parlementaires de la Communauté économique des États d’Afrique de l’Ouest (Cedeao), de la Mauritanie et du Tchad, le 22 juillet à Ouagadougou. La proclamation finale de la rencontre fixe un objectif de trois enfants maximum par femme d’ici 2030.

Et voici les élus ouest-africains taxés, sur les réseaux sociaux, de « sous-préfets » du « néo-colon » Macron, de « pantins » subordonnés au « raciste » de l’Élysée, d’adeptes de « l’aplaventrisme » devant le « mépris » français. Les débats d’avatars anonymes sont relayés par les analyses outrées mais sensées d’intellectuels ou les exhalaisons outrancières d’activistes. Connu pour ses positions contre le franc CFA, le Franco-béninois Kémi Seba, par exemple, voit dans le programme de la Cedeao « le plus grand acte de trahison de nos élites politiques », « représentants frauduleux » qui suivent « ces prix Nobel de la débilité » et les « prérogatives de Jupiter Macron », lui-même paroxysme d’une « oligarchie française condescendante ». Attention à ne pas épuiser trop vite son vocabulaire…

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Anachronismes

Surprenant débat ? Aucun Ouest-africain ne lance pourtant des pierres sur les locaux qui abritent, dans leurs capitales, les campagnes de planning familial. En temps normal, au mieux, on aurait reproché aux parlementaires de réchauffer de vieux discours ; au pire de n’être toujours qu’au stade de la formulation de politiques volontaristes dont les bienfaits sont déjà largement assimilés par les intellectuels. Mais ces élus n’ignorent pas que la loi de « l’actu » enseigne la gestion du timing. Ouaga après Hambourg, c’était une mauvaise idée, même s’il l’on imagine que les séminaristes de la capitale burkinabè avaient entamé leur réflexion avant les déclarations « allemandes » du président français. Argument de l’anticipation stérile, toutefois, quand on voit brandie comme réponse à Macron des propos d’Alpha Condé tenus avant ceux de… Macron. L’actu ne dédaigne pas un peu d’anachronisme…

Questions essentielles

Ceci dit, ne pas parler de fécondité PARCE QUE Macron vient d’en parler, c’est se soumettre à son calendrier, tout autant qu’en parler parce qu’il en a parlé. Telle quelle, l’évocation nerveuse de la fertilité serait… infertile, si elle n’avait pas l’avantage de soulever des questions essentielles. La pauvreté est-elle induite de l’excès d’enfantements ? À l’inverse, l’augmentation du « capital humain » nucléaire est-elle le palliatif à l’indigence d’une famille ?

Le paradoxe « procréatif » de « l’œuf et la poule » n’a jamais si bien illustré une situation. Tout autant que les malthusianistes favorables à la baisse de la fécondité, ces natalistes – issus d’un continent à la densité de population en deçà de la moyenne mondiale – ont à leur disposition des théories honorablement charpentées. En dépassant l’outrancier et le lapidaire, les démographes devront définir la meilleure stratégie pour l’Afrique, situation nationale par situation nationale.

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