Présidents malades : à votre santé, excellences !

Nos dirigeants sont parfois souffrants. Quoi de plus humain ? Mais ne devraient-ils pas communiquer davantage et tirer les enseignements des effets de l’âge ? Les situations varient. Et se ressemblent pourtant…

L’œil de Glez. © Glez / J.A.

L’œil de Glez. © Glez / J.A.

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Publié le 11 juillet 2017 Lecture : 3 minutes.

Il est des nonagénaires qui feraient rêver plus d’un octogénaire épuisé après quelques heures d’avions. Surtout dans le microcosme de la politique où il faut toujours avoir l’air fringant. Ce lundi, à Dakar, c’est un Abdoulaye Wade tout sourire qui débarquait ses 91 printemps en provenance de Paris, après cinq heures de vol et surtout plus de deux ans d’absence. Côté tonus, pas de mauvaise surprise, l’ancien président étant d’ailleurs de retour pour conduire activement la liste nationale d’opposition Manko Wattu Sénégal aux élections du 30 juillet. À le voir surgir de son véhicule, on jurerait qu’il est partant pour la prochaine présidentielle…

Robert Mugabe – 93 ans – a-t-il des raisons d’être jaloux de son « petit frère » sénégalais ? Que nenni, s’indigne la voix officielle du Zimbabwe qui précise que le nouveau séjour du président à Singapour, depuis le 7 juillet, concerne « un contrôle médical de routine ». Le dernier voyage du vieux Bob dans la cité-État datant de mai dernier, il est clair que les check-up deviennent « routiniers ». Mais pourquoi s’inquiéter d’une éventuelle défaillance physique, la première dame ayant affirmé, en février, que le président n’avait pas besoin d’être vivant pour être confortablement réélu ?

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Fiches médicales

Le prisme de l’âge n’est peut-être pas pertinent. Tout juste octogénaire, Abdelaziz Bouteflika pourrait (presque) être le fils de Robert Mugabe. Mais il n’est pas plus assidu que son homologue zimbabwéen dans les arcanes du pouvoir. Début juin, le chef de l’État algérien présidait le… premier Conseil des ministres de l’année 2017. Nul besoin, d’ailleurs, d’aller fouiller les fiches médicales des septuagénaires ou des sexagénaires pour y débusquer des rumeurs de santé défaillante. À 59 ans, encore frais émoulu au pouvoir, le Béninois Patrice Talon peine à éteindre les supputations sur ses deux interventions chirurgicales subies, au niveau de la prostate et de l’appareil digestif, les 26 mai et 1er juin derniers. Il paraissait pourtant en pleine possession de ses moyens, à la sortie de son jet, le 4 juillet. Quant au quadragénaire Joseph Kabila – 46 ans -, c’est bien pour d’officielles « raisons de santé » qu’il a négligé les dernières célébrations de l’indépendance de la RDC. À moins que les motifs que l’on cache habituellement soient, cette fois, exhibés pour en cacher encore d’autres…

Un petit rhume peut toujours arriver mais chat populaire échaudé craint l’eau froide. Si les Congolais scrutent la mine de leur président, est-ce parce qu’ils se souviennent de la fin de mandat maladive du vieux Léopard Mobutu Sese Seko ? L’inquiétude des Béninois doit-elle être comprise en écho de l’embolie gazeuse de Nicéphore Soglo, entre les deux tours de la présidentielle de 1991 ? Le regard des Camerounais sur les 84 ans de Paul Biya est-il influencé par les raisons de santé qui, officiellement, firent lâcher les rênes à Ahmadou Ahidjo, avant même d’avoir 60 ans ? En filigrane du carnet de santé énigmatique du président Muhammadu Buhari, les Nigérians relisent-ils le calvaire d’un autre de leurs présidents – décédé au pouvoir – Umaru Yar’Adua ?

Mais au fait, pourquoi nos dirigeants n’ont-ils pas assez développé le système de santé de leur pays pour se soigner chez eux ?

Il faut dire que l’actuel président du Nigeria est plus londonien, ces derniers mois, qu’abujanais ; et que c’est un message sans image que son peuple a eu à se mettre sous la dent, à l’occasion de la fin du ramadan. Son collègue angolais et « conscrit » de 1942, José Eduardo dos Santos est, lui, retourné à Barcelone, un mois à peine après son retour de soins médicaux dans la capitale catalane. Il a tout de même rassuré l’opinion en esquissant un prochain retrait de la vie politique, après tout de même 38 ans de pouvoir.

La « populace » alarmiste devrait-elle faire confiance à la permanence des institutions et s’abstenir d’une curiosité… maladive sur les organes de ses dirigeants ? Une question est tout de même légitime : « pendant ces périodes de soins, l’État est-il géré ? » De même qu’une autre, subsidiaire : « Tiens, tiens, pourquoi nos dirigeants n’ont-ils pas assez développé le système de santé de leur pays pour se soigner chez eux » ?

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