Bénin : l’opposition dans la rue, Patrice Talon joue l’apaisement

Ce jeudi, des forces sociales et politiques, réunies au sein d’un Front de sursaut patriotique, ont investi les artères de Cotonou pour protester contre les politiques jugées antisociales du gouvernement Talon et l’affairisme au sommet de l’État.

Vue de Cotonou (Bénin). © Youri Lenquette pour JA

Vue de Cotonou (Bénin). © Youri Lenquette pour JA

Fiacre Vidjingninou

Publié le 23 juin 2017 Lecture : 2 minutes.

Une épée de Damoclès pesait lourdement sur cette journée du jeudi 22 juin à Cotonou. Mais plus de peur que de mal. Les membres du Front de sursaut patriotique (FSP) ont défilé sans encombre dans les rues de Cotonou, scandant et brandissant des messages hostiles au gouvernement béninois. Notamment, ils ont dénoncé « la répression et la confiscation des libertés, la désarticulation et le sabotage de l’administration publique, les déguerpissements arbitraires et sauvages occasionnant l’aggravation de la misère… »

C’est la marche du « peuple affamé contre un pouvoir qui s’arroge les richesses du pays », s’est indigné Alassane Tigri, ancien secrétaire général du gouvernement de Boni Yayi (2006-2016). Pour Issè Iko, secrétaire général de la Centrale des syndicats des travailleurs du Bénin, cette « marche victorieuse » est destinée à « exiger qu’on soit gouvernés autrement ». Le Parti pour la libération du peuple (PLP, opposition) qui a pris part à la marche, a exigé, par la voix de son secrétaire général, Cécil Ahouélété Adjévi, « la fin des mesures politiquement dangereuses, économiquement inefficaces et socialement désastreuses ».

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La marche qui s’est ébranlée de la Bourse du Travail à la place de l’Étoile Rouge, au cœur de Cotonou, a mobilisé un millier de manifestants, selon les chiffres fournis par les organisateurs. Le FSP regroupe un ensemble de mouvements de la société civile et de forces politiques d’opposition, dont les Forces cauris pour un Bénin émergent (FCBE, opposition) soutenant l’ex-président Yayi. Ce Front avait mené, entre mars et avril, une série de manifestations à Cotonou et à Porto-Novo pour dénoncer l’opacité entourant le projet de révision constitutionnelle.

Talon à la rescousse

À l’annonce de cette marche, le jeudi 15 juin, un Front citoyen se réclamant de la mouvance présidentielle a fait savoir qu’il tiendrait, le même jour, une contre-marche pour exprimer son soutien au chef de l’État. Le préfet du Littoral, Modeste Toboula, a d’abord interdit les deux manifestations pour éviter les troubles éventuels à l’ordre public. Mais le mercredi 21 juin, à la veille des deux manifestations, Patrice Talon, selon un communiqué de la direction de la communication de la présidence de la République, a demandé que le préfet annule son arrêté d’interdiction et a appelé ses partisans à la retenue. « La liberté d’expression et d’opinion des Béninois reste une valeur cardinale », peut-on lire.

Une attitude du chef de l’État qui a contribué à apaiser la tension sociale et à redorer le blason d’un gouvernement qui doit faire face à des accusations récurrentes, dans l’opinion publique, d’autocratie et de restrictions des libertés publiques.

Depuis son retour d’un voyage sanitaire en France, le président Talon multiplie les gestes d’apaisement vis-à-vis de ses compatriotes. Pour répondre aux rumeurs sur les opérations chirurgicales qu’il a récemment subies, il a, dans un geste jurisprudentiel, rendu publics des détails sur son état de santé. Une première dans un contexte béninois – et même africain – où l’opacité règne en maître sur ce sujet. De même, en autorisant une marche contre son gouvernement, le président Talon assure le maintien de la réputation démocratique de son pays sur la scène internationale.

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