En Libye, on vend des migrants africains sur des « marchés aux esclaves »

Le dernier rapport de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), rendu public lundi, met en avant plusieurs témoignages glaçants, selon lesquels un certain nombre de migrants sont vendus, tels des esclaves, sur des marchés au sud de la Libye.

Des migrants secourus en mer Méditerranée par une ONG en février 2017. © Santi Palacios/AP/SIPA

Des migrants secourus en mer Méditerranée par une ONG en février 2017. © Santi Palacios/AP/SIPA

Publié le 12 avril 2017 Lecture : 3 minutes.

Lundi 11 avril, l’Organisation Internationale pour les migrations (OIM) a publié un rapport, qui signale l’existence dans le sud de la Libye de « marchés aux esclaves », où des migrants seraient vendus par des trafiquants d’être humains.

« Les migrants parlent de marchés au milieu des villages, où l’on vient acheter des hommes et des femmes migrants », indique Giuseppe Loprete, chef de mission à l’OIM Niger, à Jeune Afrique. Au sujet des réseaux qui se livrent à cette traite humaine, il explique que « c’est la première fois qu’on obtient une vision aussi complète » de leur fonctionnement.

Ce sont des situations similaires à l’esclavage tel qu’il était pratiqué avant.

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Dans son rapport, l’OIM met notamment en avant le témoignage d’un Sénégalais, SC, passé par ce type de marchés. Au cours du périple qui le mène à Agadez, au Niger, ce dernier est contraint de verser à des passeurs la somme de 200 000 francs CFA (304 euros) pour poursuivre son chemin. Le début du calvaire commence pour lui. Trompé, il atterrit dans un véritable marché d’être humains au sud-ouest de la Libye.

« Des migrants subsahariens y étaient vendus et achetés par des Libyens, avec l’aide de Ghanéens et de Nigériens qui travaillaient pour eux », peut-on lire dans le rapport de l’OIM. « Ce sont des situations similaires à l’esclavage tel qu’il était pratiqué avant », estime Giueseppe Loprete. « Certains disent que c’est pire. Nous avons des photos qui ne sont même pas publiables. »

Demande de rançon aux familles

Une fois vendus, les migrants sont parqués dans des maisons. SC emploie le terme de « prison » pour qualifier les lieux dans lesquels il a vécu alors. Pendant cette détention, beaucoup sont contraints d’appeler leurs familles. Au cours de ces appels, détaille le rapport, ils sont frappés pour faire comprendre à leurs proches qu’ils sont torturés. Et que leur libération a un coût.

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« Nous avons déjà vu des migrants à qui l’on avait coupé les doigts et les mains », se souvient Giuseppe Loprete. « L’un d’eux nous a raconté qu’un trafiquant avait tiré sur lui quand sa famille avait indiqué au téléphone ne plus avoir d’argent. »

Nous avons déjà vu des migrants à qui l’on avait coupé les doigts et les mains.

Pour obtenir sa libération, SC a dû payer 300 000 francs CFA (456 euros). Une libération de courte durée, le migrant étant ensuite « acheté » par un autre Libyen. D’après Giuseppe Loprete certains migrants comme SC, travaillent plusieurs mois sans être payés avant de finir dans une autre maison.

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Puis un jour, moyennant la somme de 600 0000 F CFA (912 euros), déboursée par sa famille, SC est libéré. Son calvaire de SC prend aussi fin grâce au sauvetage du bureau de l’OIM au Niger.

Un risque confirmé

« Les migrants que nous avons rencontré ces derniers jours ont tous confirmé le risque d’être vendu comme esclaves sur des places ou dans des garages à Sabha, soit par leur chauffeur, soit par des locaux, qui recrutent les migrants pour des travaux journaliers en ville, souvent dans le bâtiment », peut-on lire dans le rapport de l’OIM.

« Au lieu de les payer, [les « recruteurs »] vendent leurs victimes à de nouveaux acheteurs. Certains migrants, principalement nigérians, ghanéens et gambiens, sont forcés de travailler pour [les acheteurs] en tant que garde dans les maisons [où sont détenus les migrants vendus] ou même au « marché » « , détaille encore le document.

L’OIM facilite le retour volontaire des migrants venus de la Libye et de l’Algérie dans leur pays d’origine. L’année dernière, l’organisation a aidé 5 000 personnes et depuis le début de l’année, 1 500 sont rentrées dans leur pays avec l’appui de l’agence.

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