La Guinée endeuillée par la disparition de Jeanne Martin Cissé, figure de l’indépendance et des droits des femmes

La Guinéenne Jeanne Martin Cissé, première femme à avoir présidé le Conseil de sécurité des Nations unies en 1972, est décédée mardi 21 février à l’âge de 91 ans. Jeune Afrique revient sur le parcours de cette femme d’exception, pionnière dans bien des domaines.

Jeanne-Martin Cissé, représentante permanente de la Guinée aux Nations Unies, à New York, le 7 août 1972. © Nations Unies

Jeanne-Martin Cissé, représentante permanente de la Guinée aux Nations Unies, à New York, le 7 août 1972. © Nations Unies

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Publié le 22 février 2017 Lecture : 2 minutes.

Depuis plusieurs années, Jeanne Martin Cissé, 91 ans, mère de 6 enfants, vivait recluse dans sa villa de toujours, à Donka, ce vieux quartier résidentiel du centre de Conakry. Dans cette grande maison, célèbre, qui avait reçu les amis, les ministres, les présidents, les fastes des indépendances. Elle y vivait entourée de ses filles, de ses médailles, de ses livres, de ses photos en noir et blanc.

Jeune Afrique l’avait rencontrée récemment au mois de janvier. Elle ne parlait plus qu’avec les yeux, mais entendait encore, suffisamment, pour sourire des attentions. Née le 6 avril 1926 à Kankan, dans une famille musulmane modeste d’origine soussou et Malinké, elle était devenue institutrice en 1940, après avoir étudié à la célèbre école normale de Rufisque dirigée par Germaine Le Goff. Une école d’élite féminine qui s’était employée à faire de ces élèves venues de toutes l’Afrique coloniale française de futures enseignantes, attachées à leur africanité.

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Une future élite féminine

C’est là qu’elle fera la connaissance des futures grandes intellectuelles africaines, comme l’écrivaine Mariama Bâ (Une si longue lettre), ainsi que la future ministre ivoirienne Jeanne Gervais décédée en 2012, ou encore la célèbre journaliste sénégalaise Annette Mbaye d’Erneville : « On a grandi dans la même cours d’école. C’était une pionnière africaine, une grande figure, la première femme africaine à avoir eu des postes importants au niveau international ».

En effet, en 1948, elle se marie à Ansoumane Touré, un des fondateurs du Parti Démocrate Guinéen (PDG) animé par Sékou Touré. Très vite, elle milite pour l’indépendance et œuvre pour l’émancipation des femmes en Afrique.

Présidente du Conseil de Sécurité de l’ONU

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Avec l’arrivée de Sékou Touré au pouvoir en 1958, elle gravit un à un les échelons de la carrière politique. Élue député en 1968, elle est désignée en 1972 au poste de représentante permanente de la Guinée aux Nations unies, et devient par là même présidente du Conseil de Sécurité de l’ONU, son pays étant alors membre non permanent de ce comité.

En 1976, elle revient en Guinée pour devenir Ministre des Affaires sociales. En 1984, après la mort de Sékou Touré, elle est arrêtée, sans jugement, et emprisonnée jusqu’en mai 1985, puis libérée. Elle s’exilera alors de longues années aux États-Unis avant de revenir vivre dans son pays au début des années 2000.

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« C’était une battante, qui aimait avant tout l’Afrique, précise Madame Sow Nima Bâ, ex-députée du PDG, et ancienne élève de Rufisque. Elle avait offert ses services à la Guinée de Sékou Touré, parce qu’elle pensait qu’elle pourrait donner le meilleur d’elle-même. Mais la période des purges l’avait rendu triste ».

En 2008, Jeanne Martin-Cissé avait écrit une autobiographie, La fille du Milo, où elle était revenue notamment sur les grands moments de sa carrière, en refusant cependant de se prononcer sur le régime dictatorial de Sékou Touré.

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