Rama Yade : « Je démissionne, donc je suis ! »

L’ancienne protégée de Nicolas Sarkozy ne voulait plus avoir de comptes à rendre à l’Élysée. Elle en a tiré les conséquences. Rama Yade est désormais une femme politiquement émancipée.

Jean-Louis Borloo et Rama Yade. © Eric Feferberg/AFP

Jean-Louis Borloo et Rama Yade. © Eric Feferberg/AFP

Publié le 24 juin 2011 Lecture : 3 minutes.

Ce n’est pas son premier – ni son dernier – coup d’éclat. Le 14 juin, Rama Yade a démissionné de sa fonction d’ambassadrice de France auprès de l’Unesco. Un poste auquel elle avait été nommée par son mentor, le président Nicolas Sarkozy, le 22 décembre 2010, il y a seulement six mois. « J’ai besoin de renouer avec une liberté totale », a-t-elle déclaré au quotidien Le Monde, le 16 juin.

L’ex-secrétaire d’État – aux Droits de l’homme puis aux Sports – peut ainsi rejoindre Jean-Louis Borloo dans sa probable course à la présidentielle. « On va faire une super-équipe ! Son engagement auprès de moi m’oblige encore plus », a confirmé le patron du Parti radical. Rama Yade va donc intégrer la direction nationale de la nouvelle Alliance républicaine, écologiste et sociale, à laquelle appartient également la Gauche moderne de Jean-Marie Bockel, lequel, lorsqu’il était secrétaire d’État à la Coopération, en 2008, comptait parmi ses conseillers Joseph Zimet, qui n’est autre que son époux.

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Anticipation. Depuis qu’elle a affiché son soutien à Jean-Louis Borloo en rejoignant les radicaux en décembre dernier, Rama Yade savait qu’elle n’était plus en odeur de sainteté à l’Élysée. A-t-elle pris les devants afin d’éviter l’humiliation d’être « démissionnée » ? C’est probable, l’Élysée s’apprêtant à procéder à un mouvement d’ambassadeurs qui ne l’aurait probablement pas épargnée. En avril, elle semblait déjà avoir prévu un possible départ de l’Unesco puisqu’elle assurait, laconiquement : « J’existais avant, j’existerai après. »

Ce poste, une consécration pour une femme politique aussi jeune, elle l’avait pourtant accepté après avoir étudié « toutes les pistes compatibles avec son engagement politique ». Mais, durant six mois, elle a beaucoup agacé au sein de la droite. Des ministres et même des proches de Nicolas Sarkozy lui reprochent ses nombreuses interventions dans les médias, ses entorses au devoir de réserve, ses absences trop fréquentes de son bureau de l’Unesco et, surtout, ses critiques acerbes de la politique du gouvernement. Dernièrement, Rama Yade s’est prononcée contre le « débat sur l’islam » lancé par l’UMP, le parti présidentiel. Et elle n’a affiché aucun soutien à l’intervention militaire française en Libye, ce que Nicolas Sarkozy lui a vivement reproché. En avril, François Baroin, porte-parole du gouvernement, la rappelle très officiellement à l’ordre : « Il y a des obligations de réserve qui sont imposées à tous les représentants de la France qui ont le titre d’ambassadeur. Cela s’impose à tout le monde, y compris à celles et ceux qui ont une trajectoire politique. » L’ancienne benjamine du gouvernement Fillon s’était déjà distinguée en 2007 en dénonçant la visite du colonel Mouammar Kadhafi en France.

Engagement. À moins d’un an de l’élection présidentielle, Rama Yade a désormais les coudées franches et n’a plus de comptes à rendre à l’Élysée. « On est en train de s’organiser avec Jean-Louis Borloo pour la campagne électorale, a-t-elle confirmé le 15 juin. Je souhaite m’engager librement et totalement à ses côtés, en ayant du temps. » Alors que le patron du Parti radical n’a pas encore officiellement annoncé sa candidature – il le fera probablement en septembre ou en octobre –, la décision de l’ex-secrétaire d’État est un coup dur pour l’UMP. Rama Yade a signifié par ailleurs dans sa lettre « son intention de se présenter aux élections parlementaires » de 2012. En attendant, la probable future porte-parole de Jean-Louis Borloo se consacre au club de réflexion qu’elle a lancé le 10 mars, Allons enfants, dont l’objectif est de « donner la parole à la nouvelle génération […] mais aussi à tous ceux […] qui veulent trouver un lieu pour partager leurs convictions républicaines ». Des convictions que Rama Yade ne se sentait plus en mesure de défendre au sein de l’UMP.

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